mercredi 15 octobre 2025

Le projet de constitution québécoise inquiète les pro-avortements

Des groupes féministes et pro-avortements demandent de retirer la protection de l’accès à l’avortement du projet de constitution québécoise. Québec risque d’ouvrir une brèche favorable au mouvement pro-vie, craint-on.

Le ministre Simon Jolin-Barrette croyait bien faire, pourtant il est déjà confronté à une levée de boucliers. Le document présenté jeudi prévoit que « l’état protège la liberté des femmes d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse ».

Mais la Fédération du Québec pour le planning des naissances (FQPN) est inquiète.

Puisque la constitution québécoise pourra être modifiée par une simple majorité du parlement, rien n’empêchera un futur gouvernement de l’amender pour inclure des restrictions, souligne-t-elle.

Les mouvements pro-vie « attendent un tel projet depuis 1988 », affirme la FQPN. On peut penser, par exemple, à l’interdiction des avortements tardifs.


Rappelons qu'un sondage DART & Maru/Blue publié en 2020 par le National Post révèlait que, malgré un fort appui au droit à l’avortement au Canada, les opinions se durcissent concernant les avortements tardifs. Si 71 % des Canadiens soutiennent l’accès à l’avortement « quand une femme le décide », quand les sondeurs poussent plus loin leurs questions, on apprend que 70 % estiment que celui-ci devrait être généralement illégal au troisième trimestre (à partir de 28 semaines), sauf pour des raisons médicales graves. De plus, 57 % souhaitent des restrictions dès le deuxième trimestre (14-28 semaines), et une vaste majorité rejette les avortements pour sélection du sexe du fœtus. Cette dualité reflète une complexité dans l’opinion publique : un engagement théorique fort pour le droit des femmes à choisir (en l'absence de débat social et du silence des médias sur des cas d'avortement tardif), mais une réticence croissante à banaliser les interventions tardives sans justification médicale. 

Nouvelle approche

La même mise en garde avait été faite quand le gouvernement caquiste a voulu faire adopter une loi pour protéger le droit à l’avortement. Québec avait finalement reculé en 2023. Jeudi, le ministre de la Justice assurait que sa nouvelle démarche permettait d’éviter cet écueil.

« Le libellé que nous avons choisi a été mûrement réfléchi pour, justement, prendre en considération ces craintes-là […] », expliquait Simon Jolin-Barrette.

Ainsi, plutôt que de garantir directement le droit à l’avortement, Québec a choisi de protéger « la liberté des femmes » d’y avoir recours.

« Ce que la CAQ fait est dangereux et constituerait un grave recul », affirme la porte-parole de Québec solidaire, Ruba Ghazal. Le ministre Jolin-Barrette, lui, se dit « très sensible » aux préoccupations de la FQPN, qu’il a rencontrée, précise-t-il.

Sources : Journal de Québec, National Post

mardi 14 octobre 2025

Au Sud rien de nouveau ?


Les « rencontres » entre migrants et agents de la police des frontières ont commencé à diminuer au cours de la dernière année du mandat de Joe Biden. Après l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, elles ont chuté à leur plus bas niveau depuis des décennies (voir graphique au dessus ci-contre). À Tijuana, les travailleurs humanitaires affirment que les refuges pour migrants, autrefois bondés, sont aujourd'hui presque vides, à l'exception des Mexicains fuyant la violence dans leurs villes natales. Il ne semble pas s'agir d'une accalmie passagère. Presque personne ne se rend plus au nord en passant par le passage de Darién, une jungle dangereuse à la frontière entre la Colombie et le Panama qui était devenue une voie de passage pour les migrants du monde entier souhaitant demander l'asile aux États-Unis (voir graphique au dessous ci-contre). Une petite migration inverse a même commencé. Au moins 15 000 personnes, principalement des Vénézuéliens, sont retournées en Amérique du Sud depuis janvier.

M. Trump revendique la victoire sur la question qui a lancé sa carrière politique il y a dix ans. « À notre frontière sud, nous avons réussi à repousser une invasion colossale », a-t-il déclaré le mois dernier devant l'Assemblée générale des Nations unies. De nombreux experts en matière de frontières sont à juste titre sceptiques quant à l'efficacité des mesures coercitives seules. Ils affirment que la frontière entre les États-Unis et le Mexique est si longue (3 145 km) et les passeurs si rusés que les gens trouveront toujours de nouveaux moyens de la franchir. Cet argument a tenu bon, jusqu'à présent.

L'administration Trump a mobilisé toute la puissance du gouvernement fédéral pour mettre fin à l'immigration clandestine. Son approche « est multicouche, semblable à un oignon », explique Adam Isacson, du Washington Office on Latin America, un groupe de réflexion. Les démonstrations de force militaire, les sanctions plus sévères pour les personnes qui franchissent la frontière, les expulsions spectaculaires sans procès vers des prisons au Salvador et l'interdiction de l'asile se renforcent mutuellement. L'organisme des Nations unies chargé des migrations a interrogé des migrants au Mexique qui s'étaient mis en route pour les États-Unis avant de changer d'avis. La plupart ont cité les restrictions à la frontière, les changements de politique et la crainte d'être expulsés comme raisons de ne pas avoir traversé. L'approche de l'administration peut être résumée par un message publié sur une chaîne WhatsApp officielle : « Ni lo intentes » (N'essaie même pas).

Tout d'abord, considérons la puissance militaire déployée pour dissuader l'invasion présumée. Il n'est pas rare que les présidents des deux partis envoient des troupes pour aider la police des frontières dans ses tâches logistiques ou de surveillance. L'administration Trump est allée plus loin. Le président a ordonné au ministère de la Guerre ( c'est son nouveau nom) d'annexer certaines terres frontalières et de rattacher ces parcelles à des bases militaires proches (et parfois moins proches). La loi Posse Comitatus empêche les soldats fédéraux (il en va autrement de la garde national des États fédérés) d'arrêter des personnes, une tâche réservée aux policiers. Mais l'idée est que si un migrant franchit la frontière et pénètre sur ces terres annexées, les soldats peuvent le placer en détention pour intrusion sur une propriété militaire.

Ce n'est pas la seule mesure de dissuasion militaire. Des véhicules blindés Stryker et des avions de surveillance anti-sous-marins sont désormais présents dans les zones frontalières. Le projet de loi « One Big Beautiful Bill », adopté en juillet, prévoit près de 47 milliards de dollars pour poursuivre la construction du mur et l'équiper de caméras et de capteurs. Mike Banks, chef de la police des frontières, suggère que la présence militaire ne sera pas permanente. « Nous reviendrons à un point où nous contrôlerons la frontière sans avoir besoin de tout ce soutien », a-t-il récemment déclaré. Mais un retrait complet semble peu probable.

Deuxièmement, l'administration durcit le ton à l'égard de ceux qui osent encore franchir la frontière. Les interpellations à la frontière ont diminué, mais les procureurs fédéraux poursuivent de plus en plus de migrants pour entrée illégale. Certains éléments indiquent que la menace de poursuites pénales a réduit la probabilité que les migrants tentent de franchir la frontière à plusieurs reprises sous l'administration Obama. À l'époque, la police des frontières appelait cela « l'application des conséquences ».
Le troisième principe de la stratégie frontalière multicouches de M. Trump passe de l'application des conséquences à la sévérité en apparence implacable. Le processus habituel d'expulsion d'une personne, qui fait partie intégrante de l'application des lois sur l'immigration, a changé. Des agents masqués arrêtent des personnes dans la rue, les placent en détention (souvent dans des conditions peu commodes) et les renvoient parfois dans un pays où elles n'ont jamais mis les pieds. Les migrants de Basse-Californie disent aux travailleurs humanitaires qu'ils ont peur d'être emprisonnés indéfiniment aux États-Unis ou envoyés dans une prison salvadorienne. Pourquoi risquer sa vie pour traverser la frontière si c'est pour vivre dans la peur ?

La stratégie frontalière repose sur la suspension du droit d'asile décrétée par M. Trump. Les migrants pouvaient auparavant tenter d'échapper aux soldats et risquer des poursuites judiciaires si cela leur permettait d'obtenir une date d'audience et un permis de travail. Cette option n'existe plus. Dans un décret signé dès son premier jour au pouvoir, M. Trump a affirmé que « l'invasion » des États-Unis par les migrants lui permettait de refuser l'asile. Dans ce décret, il reconnaît que la plupart des présidents ont utilisé le pouvoir légal qu'il revendique pour empêcher de petits groupes de personnes d'entrer dans le pays, mais il affirme que son pouvoir s'étend à la restriction de l'accès à l'ensemble du système d'immigration du pays.

Cette décision est contestée devant les tribunaux. Un collège de trois juges de la cour d'appel fédérale de Washington a récemment statué que l'administration ne pouvait pas expulser des personnes vers un pays où elles risquaient d'être torturées, mais a autorisé le maintien de l'interdiction d'asile pendant la durée du procès. Les juges ont cité l'affaire Trump c. Hawaii, une affaire de 2018 qui a confirmé l'interdiction de voyager aux États-Unis pour les ressortissants d'une liste de pays, comme précédent pour la déférence judiciaire envers le président lorsque la politique d'immigration et la sécurité nationale sont étroitement liées. « Les tribunaux semblent certainement enclins à trouver des compromis qui leur évitent de déclarer complètement illégales les actions de Trump », explique Denise Gilman, experte en droit des réfugiés à l'université du Texas à Austin.

D'autres facteurs entrent également en jeu. Le Mexique a durci sa politique à l'égard des migrants afin de rester dans les bonnes grâces des États-Unis. Les migrants présents au Mexique ont commencé à voyager moins pour éviter d'être détenus et envoyés dans les villes du sud, près du Guatemala. De nos jours, le simple fait d'arriver à Tijuana est un exploit.

Cette situation va-t-elle durer ? « Si les tribunaux venaient à invalider l'interdiction d'asile, je pense qu'il est très probable que vous verriez beaucoup plus de gens arriver », déclare Andrew Selee, du Migration Policy Institute. 

Source : The Economist

dimanche 12 octobre 2025

Insee : six millions d’étrangers vivent en France (malgré le droit du sol et des naturalisations très nombreuses)


Première action de grâce en Amérique du Nord, la Floride française

La première Action de grâce en Amérique du Nord aurait eu lieu en Floride française.

En effet, avant de tenter de coloniser (peupler) le Canada, la France, et plus particulièrement les huguenots qui y voyaient de futurs refuges, chercha à fonder des colonies en Amérique. Sous l’impulsion de l’amiral Gaspard de Coligny, figure de proue des huguenots, Jean Ribault et René de Goulaine de Laudonnière quittent Le Havre avec 150 hommes à bord de deux vaisseaux du roi le 18 février 1562 et abordent l’Amérique aux confins de la Floride et de la Géorgie actuelles après deux mois de navigation (1er mai). Ils baptisent le pays Caroline en l’honneur de Charles IX de France, établissent un contact pacifique avec les indigènes du « pays de Chicora » (les tribus Potanos, Saturiwas et Tacatacuru). Ils élèvent un fortin, Charlesfort, au sud de l’actuelle ville de Port Royal en Caroline du Sud. Laudonnière organise une seconde expédition en 1564. Il retrouve Charlesfort rasée à la suite du raid du capitaine espagnol de Roja. Laudonnière fait alors construire, 165 milles plus au sud, un ouvrage de plus grandes dimensions, baptisé « la Caroline » (22 juin 1564). Il renvoie en France deux navires sur quatre et décide de rester sur place.

Le 30 juin 1564, l’explorateur français René de Goulaine de Laudonnière a appelé à une fête pour célébrer l’établissement du fort Caroline, près de l’actuel Jacksonville. Laudonnière avait atteint la côte de la Floride le 22 juin, puis remontait la voie navigable que Jean Ribault, deux ans plus tôt, avait surnommée la rivière de Mai, connue aujourd’hui sous le nom de rivière St Johns. Les Indiens Timucua ont chaleureusement accueilli les huguenots français et ont aidé à préparer une fête en leur honneur. « [J]e commandai que l’on sonna une trompette, afin qu’étant assemblés nous rendissions grâces à Dieu, de notre arrivée favorable et heureuse. Là nous chantâmes des louanges au Seigneur, le suppliant vouloir par la sainte grâce, continuer son accoutumée bonté, envers nous ses pauvres serviteurs ».

René de Goulaine de Laudonnière (1510-1574)

D'autres attribuent la première Action de grâce en Amérique du Nord à Martin Frobisher qui, durant sa recherche du Passage du Nord-Ouest en 1578, s'est arrêté avec son équipage sur l'île de Baffin pour rendre grâce à Dieu d'être toujours en bonne santé.

Fac-similé de l’ouvrage paru en 1586 relatant cet événement :

Source : Laudonnière, René de Goulaine de, « L’histoire notable de la Floride située ès Indes Occidentales, contenant les trois voyages faits en icelle par certains capitaines & pilotes françois, descrits par le capitaine Laudonnière, qui y a commandé l’espace d’un an trois moys : à laquelle a esté adjousté un quatriesme voyage fait par le capitaine Gourgues. » [archive], sur gallica.bnf.fr, 1586 (consulté le 10 novembre 2020), p. 112 (45)

Vandalisme antichrétien en forte hausse en France et en Allemagne : l'inquiétude grandit

En France comme en Allemagne, les églises sont la cible croissante d’actes de vandalisme, de vols, de profanations et parfois même d’attaques contre les fidèles. Les chiffres et les faits récents témoignent d’une intensification inquiétante de ce phénomène, dans un climat de plus en plus tendu autour des symboles religieux chrétiens.

Guingamp : une statue de la Vierge Marie incendiée en pleine messe

En France, une recrudescence marquée des actes antichrétiens

Au premier semestre 2025, 322 actes antichrétiens ont été recensés en France, soit une augmentation de 13 % par rapport à l’an passé. Selon le ministère de l’Intérieur, la majorité de ces actes concernent des atteintes aux biens : croix arrachées, portes fracturées, statues brisées, objets liturgiques volés. Le nombre de vols d’objets sacrés a bondi de 22,8 % en 2024, avec 820 cas signalés.

Les zones rurales sont particulièrement touchées. Dans les Landes, 27 églises ont été profanées en quelques semaines. À Mont-de-Marsan, trois individus ont été arrêtés en possession de ciboires et de calices volés. Le diocèse s’est constitué partie civile. À Badefols-d’Ans, en Dordogne, la mairie a fermé l’église du XIIe siècle après un cambriolage : tronc vidé, tapis liturgique disparu, cierges allumés retrouvés sous les chaises. Les clés sont désormais délivrées en mairie.

Dans le Nord et la Creuse, des vagues de cambriolages similaires ont visé des édifices parfois centenaires. Les régions les plus touchées en 2024 sont la Nouvelle-Aquitaine, l’Île-de-France, le Grand Est, Auvergne-Rhône-Alpes et l’Occitanie. À l’Observatoire du patrimoine religieux, on évoque une moyenne de cinq vols par semaine dans les églises françaises. Des plateformes de revente comme Leboncoin proposent régulièrement des calices ou ciboires en argent, sans traçabilité. Le président de l’Observatoire, Édouard de Lamaze, appelle à un encadrement strict de la vente de biens liturgiques, uniquement par des commissaires-priseurs.

La violence ne s’arrête pas aux objets. À Lyon, un chrétien d’origine irakienne a été assassiné en direct sur TikTok. À Paris, deux incendies ont ravagé l’église Notre-Dame-des-Champs en juillet ; le préjudice est estimé entre 2 et 3 millions d’euros. L’auteur présumé, déclaré pénalement irresponsable, était un SDF en situation irrégulière. À Pantin et La Courneuve, un autre homme, sous l’emprise du crack, a vandalisé deux églises en pleine messe, sous les yeux des fidèles.

Les profanations deviennent parfois sciemment humiliantes : à Arudy, dans les Pyrénées-Atlantiques, des excréments ont été déposés à l’entrée de l’église, de façon à ce que les fidèles les piétinent. À Panilleuse, dans l’Eure, l’autel a été partiellement incendié par des jeunes délinquants. Ces actes prennent une dimension clairement antireligieuse, au-delà du simple vandalisme.

Face à cette vague, des voix s’élèvent. La sénatrice LR Sylviane Noël dénonce une asymétrie de traitement médiatique et politique entre les actes antichrétiens et ceux visant d’autres confessions. Dans une tribune cosignée par 86 sénateurs, elle réclame la création d’un dispositif national de signalement pour les victimes d’actes antichrétiens, à l’instar des structures existantes pour l’antisémitisme et l’islamophobie. Elle critique aussi une forme d’hostilité culturelle envers les racines chrétiennes, évoquant des syndicats qui souhaitent débaptiser les vacances de Noël.

En Allemagne, une hostilité croissante envers le christianisme

La situation en Allemagne suit une évolution similaire. Si les autorités fédérales, via le Bundeskriminalamt (BKA), ne recensent que les actes motivés politiquement, ces derniers sont en forte hausse. En 2024, 337 actes antichrétiens à motivation politique ont été enregistrés, contre 277 en 2023 (+21,7 %), ainsi que 111 infractions visant des églises (contre 92 l’année précédente).

Les chiffres globaux, cependant, seraient bien supérieurs. L’Observatoire OIDAC Europe, basé à Vienne, estime à au moins 2 000 le nombre de dommages matériels causés aux églises chrétiennes allemandes en 2023. Ces actes incluent des vols, des détériorations graves et des profanations. Selon sa directrice, Anja Hoffmann, « les bibles brûlées, têtes de statues décapitées, confessionnaux détruits » deviennent de plus en plus fréquents.

La paroisse Saint-Antonius de Gronau, en Rhénanie-du-Nord–Westphalie, a ainsi décidé en février de ne plus ouvrir son église en dehors des offices, après des insultes envers les fidèles, des vols de plaques commémoratives, et des dégradations du tabernacle. Le sceptre d’une statue de la Vierge du XVIIe siècle a été volé ; le baptistère a été utilisé comme poubelle. Une habitante déplore « la perte du respect pour le sacré », dans un pays où près de 50 % de la population se réclame encore du christianisme.

Matthias Kopp, porte-parole de la conférence épiscopale allemande, observe une aggravation qualitative des attaques contre les lieux de culte. Il y voit une « hostilité ouverte contre le christianisme » et demande une répression systématique de ces actes, considérés comme des atteintes à la liberté religieuse. Il insiste sur la gravité du phénomène, qui touche au cœur de la pratique spirituelle.

Les autorités allemandes relèvent également une montée générale des « crimes de haine » : en 2024, les actes islamophobes ont augmenté de 26 %, les actes antisémites de 20,7 %. Le chancelier Friedrich Merz, dans un discours empreint d’émotion, a récemment dénoncé cette recrudescence, qualifiant de « honte » le retour d’un antisémitisme manifeste. Mais plusieurs observateurs regrettent que l’antichristianisme, bien que réel et croissant, ne bénéficie pas de la même visibilité ni du même traitement politique et médiatique.

OIDAC et la conférence épiscopale allemande s’accordent : au-delà des dégâts matériels, la fermeture progressive des églises face à ces attaques envoie un signal négatif, affaiblissant le droit au culte et le rôle spirituel de ces lieux. Ils appellent à des mesures concrètes pour sécuriser les églises, soutenir les fidèles, et préserver la liberté religieuse chrétienne, souvent perçue aujourd’hui comme minorée.

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samedi 11 octobre 2025

L'Occident reste indifférent alors que des chrétiens sont massacrés et persécutés dans le monde entier

L'Occident reste indifférent alors que des chrétiens sont massacrés et persécutés dans le monde entier

Des dizaines de milliers de personnes ont été tuées au Nigeria depuis 2009, mais ce n'est même pas le pire endroit où être chrétien

Un policier monte la garde à l'intérieur de l'église catholique Saint-François, au lendemain d'une attaque qui a visé des fidèles à Owo, au Nigeria, en 2022.


Depuis le début du siècle, ce « massacre silencieux » aurait fait 62 000 victimes chrétiennes au Nigeria.

En Corée du Nord, les personnes reconnues comme chrétiennes peuvent être tuées sur-le-champ par les forces gouvernementales ou envoyées dans des camps de travail.

Au Pakistan, les lois sur le blasphème entraînent la peine de mort et environ 25 % de toutes les affaires de blasphème concernent des chrétiens, alors qu'ils représentent moins de 2 % de la population.

Pour beaucoup, la persécution des chrétiens évoque les images anciennes des Romains jetant des gens aux lions, mais on assiste à une recrudescence mondiale des massacres et de l'oppression de ceux qui suivent Jésus-Christ.

La tragédie croissante au Nigeria a récemment attiré l'attention, mais dans l'ensemble, l'Occident a ignoré le sort des chrétiens massacrés en masse.


Et pourtant, l'Occident n'est pas à l'abri du fanatisme anti-chrétien. La situation n'est pas aussi grave que dans d'autres parties du monde, mais il existe une intolérance croissante à l'égard des chrétiens en Occident qui, si elle n'est pas maîtrisée, pourrait avoir des effets profonds sur notre société.

Selon Michael Higgins dans le National Post, le Canada a besoin de faire un sérieux examen de conscience lorsque l'incendie de plus de 100 églises chrétiennes passe pratiquement inaperçu et que le musicien et pasteur chrétien Sean Feucht est banni de certaines salles parce que ses « opinions » soulèvent des questions de sécurité.

Cependant, c'est le niveau effroyable de violence et de mort au Nigeria qui a commencé à éveiller les consciences.

Fin septembre, l'humoriste et commentateur Bill Maher a condamné les médias pour ne pas avoir rendu compte de ce qu'il a qualifié de tentative de génocide au Nigeria.

Des personnes en deuil pleurent lors d'un enterrement collectif près de l'église Saint-Sébastien à Negombo, au Sri Lanka, le 24 avril 2019, après que neuf kamikazes ont perpétré plusieurs attentats qui ont tué plus de 350 personnes le dimanche de Pâques.

Des chrétiens coptes de la ville égyptienne de Minya se préparent à enterrer leurs morts le 3 novembre 2018, au lendemain d'une embuscade tendue par des terroristes contre trois bus transportant des pèlerins chrétiens en route vers un monastère isolé dans le désert, qui a fait plusieurs morts et blessés.

« Si vous ne savez pas ce qui se passe au Nigeria, c'est que vos médias sont nuls. Vous vivez dans une bulle », a-t-il déclaré.

« Je ne suis pas chrétien, mais ils tuent systématiquement les chrétiens au Nigeria. Ils en ont tué plus de 100 000 depuis 2009. Ils ont brûlé 18 000 églises.

C'est bien plus qu'une tentative de génocide, contrairement à ce qui se passe à Gaza. Ils essaient littéralement d'exterminer la population chrétienne de tout un pays. Où sont les enfants qui protestent contre cela ? »

Il est difficile d'obtenir un chiffre précis du nombre de personnes assassinées au Nigeria, d'autant plus que de nombreux meurtres ont lieu dans les zones rurales. Ce qui ne fait aucun doute, c'est qu'un massacre à grande échelle des chrétiens est en cours.

Le Comité international sur le Nigeria (ICON), une organisation qui promeut les droits de l'homme et la liberté religieuse dans le pays, a déclaré que 62 000 chrétiens ont été tués entre janvier 2000 et janvier 2020.

L'ICON a qualifié ces événements de « massacre silencieux » en raison du manque d'attention internationale.

Parmi les personnes tuées, 43 000 ont été assassinées par Boko Haram, une organisation terroriste désignée comme telle au Canada et l'un des groupes islamistes les plus meurtriers au monde. Selon l'ICON, 19 000 autres personnes ont été tuées par des extrémistes fulani, un grand groupe ethnique composé principalement de bergers nomades musulmans.

Le tristement célèbre Boko Haram, dont le nom signifie « l'éducation occidentale est interdite » [littéralement les livres [book] interdits [haram]], considère les chrétiens comme des ennemis.

En 2014, Boko Haram a attiré l'attention du monde entier en kidnappant 276 écolières, principalement chrétiennes, dans la ville de Chibok. Plus de dix ans plus tard, 82 d'entre elles sont toujours portées disparues.

Un autre groupe islamiste, l'État islamique en Afrique de l'Ouest, est également responsable de certaines de ces atrocités.

« Ces deux groupes, ainsi que d'autres groupes similaires, ont radicalisé leurs idéologies afin d'instaurer un État régi par la charia », a déclaré Andrew Croft, responsable de la communication et des relations publiques pour Open Doors Canada, un groupe qui soutient les chrétiens persécutés dans le monde entier, dans une interview accordée au National Post.

Cette semaine, le représentant américain Riley Moore a écrit au secrétaire d'État américain Marco Rubio pour demander que le Nigeria soit à nouveau désigné comme « pays particulièrement préoccupant » en raison des meurtres de chrétiens.

Le Nigeria est aujourd'hui « l'endroit le plus meurtrier au monde pour les chrétiens », indique la lettre.

Selon M. Moore, plus de 7 000 chrétiens nigérians ont été tués rien qu'en 2025, soit une moyenne de 35 par jour, et 19 100 églises ont été attaquées ou détruites depuis 2009.

M. Moore estime à 50 000 le nombre de chrétiens tués depuis 2009.

 Au début du mois, Andrew Scheer, ancien chef du Parti conservateur et catholique, s'est levé à la Chambre des communes pour dénoncer la tragédie nigériane.

« Malheureusement, le monde ferme les yeux sur le sort des chrétiens au Nigeria », a-t-il déclaré.

Certaines des fêtes les plus sacrées du calendrier chrétien ont été entachées par des atrocités. Le dimanche des Rameaux de cette année, 56 chrétiens ont été assassinés dans un seul village par des extrémistes fulani.

Par ailleurs, Vatican News a rapporté qu'entre 2015 et 2025, 145 prêtres ont été kidnappés et 11 ont été tués.

Mais malgré toutes les morts, les destructions et les tragédies au Nigeria, ce pays n'occupe que la septième place sur la liste 2025 des pays où les chrétiens sont les plus persécutés, établie par Open Doors. Le numéro 1 est la Corée du Nord.

« En Corée du Nord, il est illégal d'être chrétien. Il est illégal de posséder une Bible. On estime à 60 000 le nombre de chrétiens emprisonnés ou dans des camps de travail en Corée du Nord. Il n'y a aucun moyen d'exprimer ouvertement sa foi en Corée du Nord », a déclaré M. Croft.

Le site web d'Open Doors (OD) met également en garde : « Vous ne serez pas le seul à être puni : les autorités nord-coréennes sont susceptibles de rassembler toute votre famille élargie et de la punir également, même si vos proches ne sont pas chrétiens. »

Les chrétiens de Somalie, qui occupent la deuxième place du classement d'OD, sont pris pour cible par Al-Shabab, un groupe islamiste violent qui souhaite éradiquer le christianisme.

Ceux qui se convertissent au christianisme peuvent être punis par leur propre famille et leur communauté. « Vous pourriez être assigné à résidence, contraint à un mariage forcé, à des rituels islamiques ou même menacé de mort. Ces facteurs font de la Somalie l'un des endroits les plus dangereux au monde pour les chrétiens », selon le site web d'OD.

Le Yémen, en troisième position, est suivi par la Libye, le Soudan, l'Érythrée et le Nigeria.

La lecture des profils de ces pays sur la manière dont ils traitent les chrétiens est sinistre.

Au Soudan, « plus de 100 églises ont été endommagées à ce jour, et des chrétiens ont été enlevés et tués ».

Au Pakistan, « le nombre de filles chrétiennes (et celles issues d'autres religions minoritaires) enlevées, maltraitées et converties de force à l'islam (souvent avec le soutien des tribunaux inférieurs) est en augmentation ».

Les lois pakistanaises sur le blasphème touchent de manière disproportionnée les chrétiens et, bien que la peine de mort soit rarement appliquée, les accusés risquent d'être attaqués ou assassinés par des foules en colère.

L'année dernière, Nazir Masih, âgé de plus de 70 ans, a été attaqué et tué par une foule après avoir été accusé d'avoir brûlé des pages du Coran.

Les quelque 97 millions de chrétiens de Chine sont soumis à de lourdes réglementations gouvernementales.

« Ces dernières années, le gouvernement a cherché de manière agressive à s'assurer que toutes les expressions religieuses soient conformes à la philosophie officielle du Parti communiste chinois », selon Open Doors.

Le groupe International Christian Concern (ICC) tient également à jour un « indice mondial de persécution ».

Il note que les chrétiens en Inde « sont confrontés à des obstacles importants, notamment des structures juridiques qui les limitent économiquement et un système judiciaire qui accorde l'impunité aux radicaux hindous qui les attaquent ».

La raison pour laquelle certains membres de la communauté internationale restent silencieux pourrait être purement économique.

« La communauté internationale ne peut ignorer la détérioration de la liberté religieuse en Inde ou la persécution continue des chrétiens », note l'ICC. « Malgré l'influence économique et géopolitique de l'Inde sur la scène internationale, il est important de tenir ce pays responsable de ses violations des droits humains. »

La liste des pays qui persécutent les chrétiens est longue.

Chaque pays a ses propres raisons et idéologies pour persécuter les chrétiens, mais la montée de l'autoritarisme et la croissance de l'extrémisme islamiste sont deux « moteurs » particuliers de l'oppression.

« La persécution s'intensifie dans le monde entier, tant en termes de propagation que d'intensité. Nous reconnaissons aujourd'hui que plus de 380 millions de chrétiens sont victimes de persécutions et de discriminations sévères en raison de leur foi en Jésus-Christ », a déclaré M. Croft.

Il a ajouté que l'un des principaux objectifs d'Open Doors est de sensibiliser les gens à la persécution qui se déroule actuellement et de les inciter à s'impliquer. « Nous essayons d'attirer l'attention des gens et de les sensibiliser », a-t-il déclaré.

Open Doors mène actuellement une campagne de six ans visant à sensibiliser le public à ce qui se passe au Nigeria et en Afrique subsaharienne. Sa « Liste mondiale de surveillance » a également été présentée au Parlement au cours des dernières années.

L'année dernière, dans un discours prononcé devant les Nations unies, Mgr Paul Gallagher, secrétaire du Saint-Siège pour les relations avec les États, a fait écho à M. Scheer en déclarant : « Les données montrent que les chrétiens sont le groupe religieux le plus persécuté au monde, et pourtant la communauté internationale semble fermer les yeux sur leur sort. »

Mais il a ensuite soulevé un autre point pertinent pour l'Occident : les gens devraient être libres de pratiquer leur foi sans contrainte.

« La dignité de l'individu et la nature de la quête de la vérité ultime exigent que chacun soit libre de toute contrainte en matière de religion. La société et l'État ne doivent pas forcer quelqu'un à agir contre sa conscience, ni empêcher quiconque d'agir en accord avec celle-ci », a-t-il déclaré.

Et pourtant, il existe de plus en plus de signes de fanatisme anti-chrétien dans la société occidentale qui peuvent empêcher les gens de pratiquer leur foi.

Un rapport publié l'année dernière par le Center for Religious Liberty (Centre pour la liberté religieuse), intitulé « Free to Believe? The Intensifying Intolerance Toward Christians in the West » (Libres de croire ? L'intolérance croissante envers les chrétiens en Occident), affirme que « à mesure que la culture dominante s'éloigne de plus en plus de la vision chrétienne du monde, les croyances chrétiennes qui contredisent les valeurs laïques progressistes sont de plus en plus dénoncées par la culture et présentées à tort comme haineuses ou sectaires ».

Le rapport met ensuite en évidence un certain nombre de cas préoccupants.

Une députée finlandaise, Paivi Rasanen, a été poursuivie pour « agitation ethnique » en raison d'un tweet contenant un verset biblique dans lequel elle exprimait son désaccord avec le parrainage par son église d'un événement Pride, pour avoir discuté de ses croyances dans une émission de radio et pour avoir publié une brochure promouvant une conception biblique du mariage par l'intermédiaire de son église.

Elle a finalement été innocentée par la Haute Cour après quatre ans de bataille juridique.

Une Britannique a été arrêtée et inculpée pour avoir prié en silence dans une zone tampon autour d'un centre d'avortement. Dans le cadre de ses conditions de libération sous caution, il lui a été interdit de prier en public où que ce soit.

Aux États-Unis, certains parents se sont vu refuser le renouvellement de leur licence d'accueil parce qu'ils refusaient d'approuver le transgenre et l'homosexualité.

Le rapport mentionne également le pasteur Derek Reimer, de l'Alberta, qui a été arrêté et inculpé pour avoir protesté contre les heures du conte avec des drag queens dans les bibliothèques publiques. Reimer a été acquitté de méfait, mais un juge a annulé ce jugement et a ordonné un nouveau procès.

Josh Alexander, l'adolescent ontarien qui a été expulsé de son école pour avoir protesté contre l'utilisation des toilettes pour femmes par des hommes biologiques, est également mentionné.

Le rapport, qui ne prétend pas être exhaustif, répertorie plus de 150 incidents « dans lesquels les gouvernements des pays occidentaux ont menacé, condamné à une amende, emprisonné ou puni d'une autre manière des chrétiens, des organisations ou des églises pour des actions liées à leur foi ».

Tony Perkins, président du Family Research Council, qui a rédigé l'introduction du rapport, a déclaré : « Il est choquant de voir des pays occidentaux — ceux-là mêmes que nous considérons comme des sociétés libres et ouvertes — prendre des mesures autoritaires à l'encontre de chrétiens qui tentent simplement de vivre leur foi. L'hostilité envers les chrétiens qui croient en la Bible augmente clairement et régulièrement en Occident. »

Le Canada a également fait l'objet d'une attention internationale cette année en raison du traitement ridicule réservé à Feucht, qui a été censuré et exclu de nombreuses plateformes à travers le Canada, généralement pour des raisons de « sécurité », mais presque certainement parce que les gens étaient offensés par ses convictions et ses valeurs chrétiennes sans détour.

Le mois dernier, le chef conservateur Pierre Poilièvre s'est dit alarmé par le nombre d'incendies d'églises au Canada, qu'il a qualifiés d'« attaques terroristes » dirigées contre les chrétiens.

Il n'existe pas de liste officielle du nombre d'églises qui ont été attaquées au Canada, mais au moins 33 ont été réduites en cendres depuis mai 2021 et des dizaines d'autres ont été vandalisées ou profanées.

Une analyse du Macdonald-Laurier Institute a révélé qu'il y avait eu 238 incendies criminels contre des institutions religieuses, principalement chrétiennes, entre mai 2021 et décembre 2023.

En mai 2021, la Première Nation Tk'emlúps te Secwépemc de Kamloops, en Colombie-Britannique, a affirmé avoir découvert des centaines de tombes potentielles dans l'ancienne école résidentielle indienne de Kamloops. Aucune n'a été retrouvée.

« Les chrétiens sont peut-être le groupe le plus touché par les violences motivées par la haine », a déclaré M. Poilièvre. « Mais, bien sûr, il n'est pas politiquement correct de le dire. »

Le grand nombre d'incendies d'églises au Canada aurait dû susciter un débat national, voire une véritable angoisse. La police aurait dû annoncer qu'elle recherchait activement les suspects.

Selon Michael Higgins dans le National Post, le gouvernement fédéral canadien aurait dû s'engager à protéger tout groupe confronté à de telles attaques. Les médias auraient dû couvrir cette affaire sans relâche. Au lieu de cela, le Canada est resté indifférent.

Le préjugé anti-chrétien croissant dans un Occident de plus en plus laïc peut provenir d'une vision selon laquelle la religion est anachronique et ses valeurs ne reflètent plus celles de la société.

Ce que l'Église considère comme des vertus ne correspond pas aux caractéristiques déterminantes d'une culture occidentale qui a intégré le narcissisme dans ses mœurs.

L'Occident est loin de la violence sanglante infligée aux chrétiens sans défense au Nigeria. Mais le fanatisme, où qu'il se trouve, est une plaie purulente qui infecte le corps politique.

Voir aussi 

Vandalisme antichrétien en forte hausse en France et en Allemagne : l'inquiétude grandit

Canada — 112 églises incendiées ou vandalisées, timide réaction du PM Trudeau qui organisa alors un sommet sur l'islamophobie (m à j)

France — Actes antichrétiens : l’assourdissant silence des médias et de la classe politique

Attaque de colons sionistes contre un village chrétien palestinien (Taybeh/Tayibé)

Les communautés chrétiennes en Israël font face à une hostilité croissante, selon un rapport annuel

Le Noël tourmenté des chrétiens d'Orient

Syrie — Au moins 20 morts dans un attentat contre une église grecque-orthodoxe

« Certains Israélites crachent sur les chrétiens qu’ils croisent à Jérusalem », Mgr Gollnisch de l'Œuvre d'Orient

Nouvelle enquête de Reuters sur les massacres d'Alaouites. Les forces syriennes ont massacré 1 500 alaouites. La chaîne de commandement a conduit à Damas.

Révisionnisme — Pour Mélenchon, Saladin a permis aux Occidentaux de construire les cathédrales

 

vendredi 10 octobre 2025

Moins de catéchisme, moins d’enfants : quand la fin de l’enseignement religieux façonne la société allemande

La suppression progressive des cours religieux obligatoires dans les écoles allemandes entre 1972 et 2004 a laissé une empreinte durable sur les adultes d’aujourd’hui : pratiques religieuses réduites, revenus et emploi en hausse… mais moins d’enfants. Cette étude montre que l’école ne se contente pas de transmettre des savoirs : elle façonne profondément croyances, comportements et choix de vie.
 
Une étude publiée en octobre 2025 dans le Journal of Human Resources par Benjamin Arold, Ludger Woessmann et Larissa Zierow apporte un éclairage rare sur la manière dont l’école façonne durablement les croyances religieuses et certains comportements de vie.

L’école peut façonner les croyances et comportements bien au-delà de l’acquisition de connaissances. C’est la conclusion d’une étude publiée dans le Journal of Human Resources par Benjamin Arold, Ludger Woessmann et Larissa Zierow, qui s’appuie sur l’expérience allemande unique d’une abolition progressive de l’enseignement religieux obligatoire entre 1972 et 2004. Environ 1000 heures de cours religieux sur la scolarité, soit plus de quatre fois le volume consacré à la physique, sont devenues optionnelles dans différents Länder, les élèves pouvant choisir entre religion et cours d’« éthique » non religieux.

Pour mesurer l’impact de cette réforme, les auteurs exploitent trois grandes enquêtes représentatives : le National Educational Panel Study (NEPS), le German General Social Survey (ALLBUS) et le German Socio-Economic Panel (SOEP). Leur base fusionnée contient jusqu’à 58 000 observations d’adultes entrés à l’école primaire entre 1950 et 2004. L’approche économétrique utilise un modèle à effets fixes sur l’état et la cohorte, contrôlant pour les caractéristiques individuelles, et compare les trajectoires des élèves exposés ou non à l’enseignement religieux obligatoire.

Les résultats sont clairs : la fin des cours religieux obligatoires réduit significativement la religiosité à l’âge adulte. Les anciens élèves pratiquent moins la prière, fréquentent moins l’église et adhèrent moins souvent à une Église, avec des effets plus marqués dans les régions majoritairement catholiques. Les analyses temporelles indiquent que l’effet sur la prière se développe progressivement, tandis que celui sur l’adhésion à l’Église correspond à un changement quasi immédiat.

La réforme a également des conséquences sur la vie économique et familiale. Les adultes ayant suivi des parcours scolaires plus séculiers affichent une participation accrue au marché du travail, plus d’heures travaillées et des revenus plus élevés, tandis que leur fécondité diminue, reflétant la moindre influence des valeurs religieuses sur les choix familiaux. En revanche, aucun effet n’est observé sur les valeurs éthiques (réciprocité, confiance, bénévolat, satisfaction de vie) ni sur les valeurs politiques (intérêt politique, vote, satisfaction de la démocratie).

Loin d’être neutre, la place donnée à la religion — ou à son absence — dans les programmes scolaires semble façonner la sécularisation et certains choix de vie au cœur des sociétés modernes. 

La robustesse des résultats a été testée de multiples manières : aucune relation n’est observée avec des variables placebo comme la durée de scolarité ou l’âge du premier emploi, et les effets demeurent stables en contrôlant d’autres réformes éducatives contemporaines ou en comparant des comtés voisins situés de part et d’autre des frontières d’État. Les auteurs confirment également la fiabilité de leurs estimations avec des tests récents sur les modèles à deux effets fixes.

En résumé, cette étude illustre la puissance durable de la socialisation scolaire sur la religiosité et certains choix de vie. La place accordée à la religion à l’école influence non seulement la pratique spirituelle mais aussi les comportements économiques et familiaux, renforçant l’idée que l’éducation façonne profondément la société.


jeudi 9 octobre 2025

Danemark : le retard scolaire n'est pas comblé après plusieurs générations pour les non-Occidentaux

Ce bref article propose un survol de la performance scolaire des immigrés au Danemark, en mettant particulièrement l’accent sur le degré d’assimilation observé d’une génération à l’autre.

Première génération : une progression initiale limitée

Une récente étude issue des travaux de Hassan et al. (2023) met en lumière les résultats scolaires des réfugiés au Danemark. Sans surprise, ces derniers accusent, à leur arrivée, un retard beaucoup plus marqué en danois qu’en mathématiques — un écart aisément compréhensible compte tenu de la barrière linguistique.


Au fil du temps, on observe des progrès dans les deux matières, mais nettement plus prononcés en danois. Après environ sept années, les résultats tendent à se stabiliser : l’écart entre les matières s’estompe, mais le niveau moyen demeure à environ un demi écart-type en dessous de la moyenne nationale — et légèrement plus bas encore que celui des natifs danois. Passé ce point, le rattrapage ne progresse plus de manière importante. C’est statistiquement significatif. Ce n’est pas énorme, mais c’est un retard réel et stable, surtout quand il ne se comble plus avec le temps.

De la première à la deuxième génération : des gains substantiels

Les enfants d’immigrés — communément appelés immigrés de seconde génération — présentent des résultats scolaires sensiblement meilleurs que leurs parents. Cela ne saurait étonner, dans la mesure où ces enfants grandissent au sein du système scolaire danois, avec le danois pour langue maternelle — un avantage dont leurs parents ne bénéficiaient pas.

Les données fournies par Statistiques Danemark révèlent une amélioration marquée. Chez les garçons, les notes moyennes augmentent de manière significative entre la première et la seconde génération, tous tests confondus. L’amélioration est particulièrement notable en danois, plus modéré en mathématiques — une tendance attendue.

Autre fait notable : les descendants d’immigrés originaires de pays occidentaux obtiennent des résultats très proches de ceux des Danois d’origine. En revanche, les enfants d’immigrés non occidentaux accusent toujours un retard scolaire important, même en seconde génération.

De la deuxième à la troisième génération : une stagnation inattendue

Si le passage de la première à la deuxième génération s’accompagne d’un net progrès, l’idée selon laquelle chaque génération bénéficierait d’une assimilation croissante n’est pas confirmée par les données.

En effet, tant la deuxième que la troisième génération ont grandi dans un contexte linguistique et scolaire identique : danois comme langue maternelle, scolarité complète au Danemark. Statistiquement, aucune différence notable n’apparaît entre les deux groupes. Les données de officielles danoises (2023) indiquent des résultats presque parfaitement superposés.

Cela remet en question l’hypothèse d’une assimilation linéaire et continue au fil des générations. Il convient néanmoins de nuancer cette conclusion : des différences de composition selon les origines nationales entre la deuxième et la troisième génération pourraient masquer de faibles évolutions.

Pourquoi les immigrés non occidentaux restent-ils à la traîne ?

Au Danemark, les descendants d’immigrés occidentaux affichent en moyenne des résultats comparables à ceux des natifs. Le retard persistant concerne essentiellement les descendants d’immigrés non occidentaux.

Ce phénomène n’est pas propre au Danemark. De nombreuses études internationales ont établi une corrélation entre les performances scolaires des élèves issus de l’immigration et celles des populations de leurs pays d’origine. Cette corrélation perdure à travers les générations (De Philippis & Rossi, 2020 ; Carabaña, 2011). Les différences observées semblent être le reflet de disparités de capital humain existant entre pays, qui se transmettent de manière intergénérationnelle.

Dans les cas où les immigrés surpassent nettement la moyenne de leur pays d’origine — comme c’est parfois le cas pour les immigrés provenant d'Inde —, cela s’explique souvent par une forte sélection à l’entrée (van de Werfhorst & Heath, 2019 ; Cattaneo & Wolter, 2015).

Conclusion

En matière de performance scolaire, l’assimilation des immigrés au Danemark est nette entre la première et la deuxième génération — un phénomène logique, lié à l’exposition complète à la langue et à l’école danoise.

En revanche, au-delà de la deuxième génération, aucune amélioration significative n’est observable. En moyenne, les descendants d’immigrés non occidentaux continuent de présenter des résultats scolaires inférieurs à ceux des Danois d’origine, et ce constat reste vrai pour la troisième génération.  

 
 

 Performances des immigrants de deuxième génération et des autochtones. Source : De Philippis & Rossi (2020) 

Comment lire le graphique ci-dessus. 

La ligne pointillée est la bissectrice 𝑦 = 𝑥

Elle indique l’égalité parfaite entre les deux moyennes (natifs et immigrés de deuxième génération).

Si un pays se trouve sur cette ligne, cela signifie que les enfants d’immigrés obtiennent le même score moyen que les natifs.

Si un pays est au-dessus, les enfants d’immigrés réussissent mieux que les natifs.

Si un pays est en dessous, ils réussissent moins bien. 

La ligne pleine est une droite de régression : elle montre la tendance moyenne entre les deux variables (la relation empirique observée entre scores des natifs et scores des enfants d’immigrés).

  • Elle a souvent une pente proche de 1 : les pays où les natifs ont de bons scores sont aussi ceux où les enfants d’immigrés réussissent bien.

  • Mais l’interception (et les écarts autour de cette droite) indiquent des différences structurelles selon les pays.

Un score de 0 correspond à la moyenne globale (souvent sur l’ensemble de l’échantillon international).

Un score de +1 veut dire une performance supérieure d’un écart-type à la moyenne mondiale, et -1 une performance inférieure d’un écart-type. C’est donc une échelle relative.

Le point USA est sous la ligne pointillée, ce qui signifie :

Les enfants d’immigrés de 2e génération obtiennent des scores plus faibles que les natifs américains.

Et comme ce point est aussi en dessous de la ligne de tendance, cela veut dire que les États-Unis font un peu moins bien que la moyenne internationale, même compte tenu du niveau des natifs. Autrement dit, l’écart entre natifs et enfants d’immigrés y est plus marqué que dans d’autres pays au même niveau de performance globale.


Le point IND dans le graphique.

Position sur l’axe horizontal (x) : score moyen des natifs indiens — souvent plutôt faible en comparaison internationale (l’Inde a un système éducatif très inégal, et les évaluations internationales y sont limitées à des régions pilotes).

Position sur l’axe vertical (y) : score moyen des enfants d’immigrés indiens (de 2ᵉ génération) vivant dans d’autres pays.

Le point IND est donc très au-dessus de la diagonale,l es enfants d’immigrés indiens réussissent donc beaucoup mieux que les natifs indiens.

Pourquoi un tel écart ? Cela tient à la sélection migratoire.

L’émigration indienne moderne (vers les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni, etc.) est hautement sélective sur le plan éducatif et socioéconomique :

  1. une très grande part des migrants sont diplômés universitaires (souvent en ingénierie, informatique, médecine) ;
  2. ils viennent de couches moyennes et supérieures ;
  3. leurs enfants bénéficient d’un capital éducatif et linguistique élevé et d’une forte pression académique.
Les enfants d’immigrés indiens (2ᵉ génération) obtiennent souvent des scores supérieurs à la moyenne nationale du pays d’accueil, et très nettement supérieurs à ceux des natifs indiens.

 

« Faire des bébés, c’est payant... mais personne au Québec n’en veut! »

Texte paru dans le Journal de Montréal.


Jamais dans l’histoire du Québec les familles n’ont fait aussi peu de bébés: 1,33 enfant par femme. Un creux historique.

Même dans les années 80, en pleine crise économique, on faisait plus de bébés! Et pourtant... jamais le Québec n’a été aussi généreux avec les familles.

Aujourd’hui, un couple peut recevoir jusqu’à 50 semaines de congé parental. Le papa a droit à cinq semaines payées à 70% de son salaire. La maman? À 18 semaines de congé de maternité. Ensuite, 32 semaines à partager, dont les premières à 70% du revenu, puis à 55%.

On parle ici d’un des régimes les plus généreux au monde.

Ajoutez à ça des places en garderie à 9,10$ par jour. [Rien pour les mères de famille qui décident de rester à la maison et de ne pas retourner au bureau... Le bureau plutôt que les berceaux et les fourneaux. C'est voulu. En 1982, Claire Bonenfant, la très féministe présidente du Conseil de la Femme, s'était interrogée, au sujet d'une politique avec de timides conséquences natalistes : « Cette politique sera-t-elle une politique nataliste déguisée cherchant à nous retourner aux berceaux et aux fourneaux ou bien se présente-t-elle comme une politique de justice sociale ? » ]

Ajoutez à ça les prestations familiales. Grâce à l’Allocation canadienne pour enfants, une famille moyenne avec trois enfants peut recevoir jusqu’à 12 000$ par année. C’est l’équivalent de 10% d’un salaire familial moyen! [Il reste à montrer que 3 enfants coûtent moins quand on comptabilise l'achat d'un véhicule plus grand, d'une maison plus grande, etc.]

Ajoutez à ça la fécondation in vitro gratuite, payée par le gouvernement du Québec. Et malgré toutes ces mesures... on ne fait plus d’enfants.

La Cadillac!

Au Québec, on a mis au point la Cadillac des politiques familiales [Pas vraiment, il n'y a pas de quotient familial]. Et elle reste dans le garage. Clairement, le problème n’est plus financier... Il est culturel, social et structurel.

Faire un enfant, dans la tête des jeunes familles, c’est devenu un projet risqué. Un projet souvent trop cher, trop exigeant, trop contraignant.

Le logement est inaccessible. Le coût de la vie explose. Les jeunes parents sont à bout de souffle.

Le résultat est préoccupant: d’ici cinq ans, un Québécois sur quatre aura plus de 65 ans. Dire qu’on manque déjà de médecins spécialisés pour soigner les aînés!

Pendant ce temps, la jeune génération crie «Boomer!» sur TikTok. Mais pendant qu’on blâme les plus vieux, personne ne prépare la suite. Parce qu’à ce rythme-là, ce n’est pas en CPE que se joue l’avenir du Québec... mais en CHSLD.

Et l’enfant roi n’est plus. C’est le papy roi qui s’installe! Avec sa pension, son bungalow payé, son REER gonflé... et bientôt, son lit en CHSLD réservé.

Que faire?

Le Québec paie pour des bébés, mais récolte une crise démographique. Il est temps d’arrêter de penser que l’argent suffira. Faire un enfant, ce n’est pas juste une affaire de chiffres. [C'est juste.]

C’est une décision intime, émotive, existentielle. Aujourd’hui, trop de jeunes parents ont l’impression de devoir s’excuser d’avoir un bébé.

Dérangeant dans l’autobus, inadapté au bureau, encombrant au resto. La parentalité s’est banalisée, parfois même dévalorisée. Il est grand temps de renverser cette perception.

Il faut revaloriser le rôle de parent, dans le discours public, dans les milieux de travail et dans l’aménagement de nos villes et nos villages. Donner envie! Pas en envoyant un dépôt direct, mais en bâtissant une culture qui célèbre l’arrivée d’un enfant.

Le message doit être clair: au Québec, fonder une famille, c’est une richesse et non un sacrifice.

Voir aussi

 Les parents seraient plus heureux que les gens sans enfant (rediff)

Le quotient familial ou le système de conjugalisation des revenus est un mécanisme fiscal, notamment utilisé en France, où l'impôt sur le revenu est calculé en fonction du revenu total du foyer fiscal, divisé par un nombre de parts déterminé par la composition de la famille (nombre d'enfants, situation matrimoniale, etc.). Cela permet de réduire l'impôt pour les familles où un seul conjoint perçoit un revenu élevé, comparé à un système où chaque individu est imposé séparément sur son revenu personnel.

Stephen Harper, en tant que Premier ministre conservateur du Canada, a introduit en 2014 une mesure appelée Fractionnement du revenu familial, qui permettait aux couples avec enfants de moins de 18 ans de partager jusqu'à 50 000 $ de revenus pour réduire leur impôt, avec un crédit plafonné à 2 000 $.  

mercredi 8 octobre 2025

Plus on explique le coût induit par les éoliennes, plus le soutien à l’éolien chute

«Les Français ont globalement une image positive de l’éolien. Mais dès que l’on explique le coût que cela induit sur la facture énergétique[, la manière dont elle sont fabriquée, l'intermittence de cette énergie,] ce soutien à l’éolien chute complètement», observe Paul Cébille dans «Terre des Hommes». Une baisse de 46 points au soutien des éoliens après une explication de ce type d'énergie.

Le sondage IFOP en question est intitulé "L’image de l’énergie éolienne auprès des Français", publié en novembre 2021. Il met en évidence une baisse du soutien à l'éolien lorsque les répondants sont informés des aspects critiques comme son intermittence, son inefficacité perçue pour lutter contre le réchauffement climatique, et les surcoûts associés (par exemple, seulement 25 % des Français sont prêts à payer plus cher pour des énergies intermittentes).  

Dans cette enquête, après présentation des conclusions du rapport GIEC (insistant sur le besoin de multiplier les capacités nucléaires par six pour la neutralité carbone) et du rapport parlementaire sur les énergies renouvelables (soulignant l'incapacité des énergies intermittentes comme l'éolien à combattre efficacement le climat), l'image de l'éolien se dégrade : 44 % des Français ont une mauvaise opinion (contre 34 % une bonne), avec une défiance accrue sur les impacts environnementaux (pollution visuelle/sonore à 72 %, dégradation des paysages à 68 %) et son manque d'efficacité (67 %).  

Cela illustre la versatilité de l'opinion publique sur le sujet : habituellement bienveillante (c'est la bonne opinion, dans l'air du temps), elle bascule vers l'opposition face à ces explications et arguments critiques.

Un sondage connexe, "Les connaissances des Français en matière d’énergie éolienne" (février 2021), montre aussi que plus les personnes sont informées (surtout les sceptiques), plus leur opposition grandit, avec un score de connaissances plus élevé chez les opposants.  

Voir aussi