jeudi 17 octobre 2024

Complotisme — Trudeau affirme que les Russes financent Jordan Peterson et Tucker Carlson

Hier, Justin Trudeau lors de son témoignage devant la Commission sur l’ingérence étrangère, le Premier ministre du Canada a accusé Jordan Peterson et Tucker Carlson, deux personnalités critiques de Trudeau, d’être financés par RT, le diffuseur russe. Voir vidéo ci-dessous.

Jordan Peterson a demandé à recevoir cet argent. 

Sa fille, Mikhaila se demandait s’il ne faudrait pas poursuivre Justin Trudeau en justice pour ces affirmations infondées.



Cette affirmation, assénée sans preuve fournie, intervient quelques semaines après que le député libéral Mark Gerretsen a présenté des excuses publiques pour avoir accusé une autre influente conservatrice canadienne (Kat Kanada) d’être financée par la Russie.

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Quand la télé publique française veut « déconstruire » le roman historique national

Avec « Notre Histoire de France », France 2 a pour ambition affichée de « moderniser le documentaire » mais surtout « déconstruire le roman national ». Pour ce faire, la chaîne publique a mis les moyens avec Tomer Sisley à la présentation, et entend se distinguer en abordant l'Histoire au-delà des rois et des grands personnages. À l'opposé donc de l'Histoire façon Stéphane Bern, Franck Ferrand ou Lorant Deutsch.

Pari réussi ? France 2 est-il parvenu à « déconstruire » ce vilain roman national accusé de tous les maux ?


Les chrétiens du IVe siècle, des persécuteurs comme les païens avant eux ?

Un collectif d’historiens, dirigé par Marie-Françoise Baslez, fait la part des réalités et des légendes dans l’histoire des violences religieuses du IVe siècle.

Voltaire avait statué, dans son Dictionnaire philosophique, à l’intention de l’intelligentsia de son temps : Constantin avait bien pu proclamer la liberté de religion dans son édit de Milan (313) ; lui et ses successeurs n’avaient rien eu de plus pressé que de persécuter les religions concurrentes d’un christianisme devenu triomphant. L’entreprise les avait occupés au point qu’elle leur en avait fait perdre le sens des devoirs de leur charge et les avait conduits à négliger la défense des frontières face aux incursions des Barbares.

La caricature a traversé les siècles. Elle inspire encore aujourd’hui documentaires et œuvres de fiction. Elle a été relayée par un courant historiographique que le spectacle du fondamentalisme musulman a conduit depuis 2001 à populariser l’idée d’une violence intrinsèque aux monothéismes, et plus généralement, à toutes les religions fondées sur une communauté de foi.

Dans une veine similaire, le philosophe Georges Leroux, un des pères du cours d’éthique et de culture religieuse, avait écrit en oubliant sans doute la Première Guerre mondiale, le nazisme et le stalinisme : « Alors que la période prémoderne se caractérisait par la recherche de l’hégémonie religieuse et par le prosélytisme qui conduisit l’Europe aux guerres les plus meurtrières de son histoire, la période moderne se caractérise par la sécularisation, la tolérance et le respect mutuel dans l’aire occidentale. » (page 24 de son Rapport d’expert présenté dans la requête Suzanne Lavallée et Daniel Jutras relative au programme d’éthique et culture religieuse, février 2009). Il assènera la même assertion dans son expertise remise dans l’affaire Loyola c. le Monopole de l’Éducation du Québec qui s’est également rendue jusqu’en Cour suprême du Canada et dont on attend avec impatience la décision.

Spécialiste de l’Orient hellénistique et du christianisme primitif (elle est l’auteur d’une biographie de Saint Paul, aux éditions Pluriel), professeur d’histoire des religions de l’Antiquité à la Sorbonne, Marie-Françoise Basiez avait consacré en 2007 à la question des persécutions durant l’Antiquité une somme couronnée par le prix Chateaubriand (Les Persécutions dans l’Antiquité. Victimes, héros, martyrs, chez Fayard). Elle a réuni aujourd’hui une équipe pluridisciplinaire pour ouvrir à nouveaux frais le dossier des persécutions dont se seraient rendus coupables les chrétiens. Privilégiant l’étude de cas, la contextualisation des sources, la confrontation méthodique des témoignages littéraires avec les découvertes de l’archéologie, Chrétiens persécuteurs, le recueil qui en réunit les contributions, offre, en dépit du caractère unilatéral de son titre, un antidote aux généralités marquées du sceau de l’anachronisme en même temps qu’un tableau tout en nuances de l’histoire religieuse d’un siècle charnière.

Le Figaro Histoire a rencontré Mme Baslez, nous en reproduisons les grandes lignes. Nous tenons à préciser qu’il faut se garder, notamment, de confondre des hommes de pouvoir qui se disent chrétiens, parfois par opportunisme, et le christianisme véritable.

Question – Votre titre reprend à son compte le paradoxe de Voltaire, selon lequel, à peine réchappés des persécutions dont ils avaient été victimes, les chrétiens seraient eux-mêmes devenus persécuteurs des païens. S’agissait-il dans votre esprit d’illustrer ce paradoxe ou de le mettre à l’épreuve des faits ?

Mme Baslez – Nous sommes surtout partis du choc provoqué chez ceux qui l’ont vu par un film récent, Agora, qui retraçait l’histoire d’Hypatie, cette philosophe païenne lynchée dans les rues d’Alexandrie en 415. Le film désignait en effet le patriarche Cyrille comme l’instigateur du crime et faisait des parabalani, cette confrérie chrétienne chargée de soigner les pauvres, les exécuteurs de ses basses œuvres, dans un climat d’intolérance exacerbé.

Scène du film Agora d'Alejandro Amenabar (2009) qui raconte de façon romancée l'histoire d'Hypatie, philosophe païenne lynchée à Alexandrie au Ve siècle
Notre titre est évidemment provocant, et il aurait sans doute été plus clair en le dotant d’un point d’interrogation. Nous avons en effet voulu partir du préjugé qui nous a paru dominant, et dont ce film donnait l’illustration, préjugé selon lequel, en dépit de la tolérance proclamée en principe par Constantin en 313, dans son fameux édit de Milan, les chrétiens seraient devenus persécuteurs dès qu’ils en auraient eu les moyens. La christianisation du monde romain avait-elle été pacifique ou violente ? L’âpreté des luttes religieuses de l’époque était-elle liée à la romanité, aux mœurs de l’Antiquité tardive ou à la nature propre du christianisme ? Notre équipe pluridisciplinaire, qui compte aussi bien dans ses rangs des historiens de Rome que des professeurs de littératures anciennes, des juristes, des spécialistes de Byzance, du judaïsme ou du christianisme, s’est donné l’objectif de faire justice des idées reçues en passant les faits au crible de la critique historique.

Comment définir ce qu’est une persécution ?

– Il s’agit au départ d’un terme juridique désignant les poursuites ordonnées lors d’une instruction judiciaire. Il a été utilisé par les chrétiens au IIe siècle pour dénoncer l’injustice de la répression dont ils faisaient l’objet de la part des autorités romaines. Le terme a dès lors été marqué d’une connotation subjective, exprimant le ressenti des victimes. L’historien ne peut évidemment se contenter de ce point de vue.


Il lui appartient de le confronter à d’autres, et singulièrement à celui de l’État, tel qu’il s’exprime dans les formes de répression légales.

Nos contemporains parlent de persécution lorsque cette répression porte atteinte aux droits de l’homme. Ce critère n’est évidemment pas applicable à l’Antiquité. L’historien doit trouver autre chose. Ma proposition a été de recourir au contexte et de considérer comme persécution tout ce qui, dans l’inventaire des mesures policières, militaires, légales ou illégales contre un groupe religieux, dépassait la norme de la répression ordinaire. J’y ajouterai le choix de donner à cette répression une forme symbolique : il me semble en effet que ce n’est pas la même chose de tuer un prêtre ou un évêque au cours d’une manifestation, parmi d’autres, ou de l’assassiner dans sa cathédrale en habits sacerdotaux, comme on l’a fait au Moyen Âge pour Thomas Becket ou de nos jours au Salvador pour Mgr Romero.

Comment est-on passé de la proclamation de la liberté de religion par Constantin, en 313, à la fermeture des temples par Théodose quatre-vingts ans plus tard ?

– La religion faisait traditionnellement partie chez les Romains des éléments constitutifs de la communauté politique et de l’État. L’idée d’une séparation leur était absolument étrangère (comme elle l’était d’ailleurs à Saint Paul et aux Pères de l’Église). L’unité politique reposait à leurs yeux sur l’unité de religion.

Constantin proclama en 313 la liberté de chacun de prier « la divinité » de la manière de son choix. Il n’en souhaitait pas moins, dès l’origine, le rétablissement de l’unité religieuse par l’élimination progressive des religions concurrentes à celle qu’il identifiait comme « la véritable religion ». La phase de christianisation était, à ses yeux, transitoire. Elle devait aboutir à la disparition du paganisme.

Comme leurs prédécesseurs et tous les gouvernants romains du temps de la République, les empereurs chrétiens estimaient qu’ils devaient s’appuyer sur la religion et pourfendre les superstitions. À l’époque de Constantin, celles-ci ne vont être assimilées qu’aux pratiques divinatoires : magie, divination, haruspicine étrusque. Petit à petit, la définition de la superstition va pourtant s’élargir pour englober d’autres manifestations du polythéisme. Il y avait, par exemple, une désaffection générale pour les sacrifices sanglants. Ils inspiraient un même dégoût aux chrétiens, aux juifs et aux néoplatoniciens, qui étaient adeptes du culte des images. Cela a permis à Constantin et à ses successeurs de les inclure parmi les superstitions prohibées. In fine, à la fin du siècle, Théodose va étendre le concept à tous les cultes non chrétiens.


Le temple de Zeus à Olympie. Il était l'un des plus importants lieux du culte panhéllénique de 456 av. J.-C. à 393 apr. J.-C. quand l'empereur Théodose Ier interdit les Jeux olympiques. Il fut complètement détruit lors d'un tremblement de terre au VIe siècle.

La persécution du christianisme avait été fondée aux trois premiers siècles sur une prohibition légale d’une religion considérée, en soi, comme « illicite » et qu’il suffisait de confesser pour être condamné au supplice. Elle avait pris, sous Dèce, sous Valérien et sous les Tétrarques, la forme d’une persécution d’État frappant de la peine de mort ceux qui refusaient de pratiquer les anciens cultes. Trouve-t-on, au IVe siècle, des pratiques analogues à l’encontre, cette fois, des païens ?

– C’est poser la question en termes de pratique répressive, ce que l’on fait rarement. Toute une littérature est en effet fondée sur la systématisation de considérations théoriques selon lesquelles ceux qui avaient été capables, au cours des trois premiers siècles, de mourir pour Dieu seraient naturellement passés à l’idée de tuer pour Lui, le lien se faisant autour de la notion de mort expiatoire.

Dans une série d’émissions télévisées consacrées à l’Apocalypse qui a eu un grand retentissement, Jérôme Prieur et Gérard Mordillat voyaient déjà dans Ignace d’Antioche le prototype des fous de Dieu parce qu’il avait accepté avec sérénité de mourir martyr.

Ce que doit constater tout historien honnête de cette période, c’est qu’aucune comparaison symétrique ne peut être dressée entre les persécutions des chrétiens au cours des trois premiers siècles de notre ère et ce qui s’est passé lors de la christianisation de l’empire au IVe siècle. L’interdit légal du polythéisme, accompagné de la fermeture des temples et des écoles philosophiques, de la prohibition des mystères d’Éleusis et de la suppression des Jeux olympiques, n’est en effet intervenu qu’à la fin du siècle, alors que la christianisation de l’empire avait touché la majorité de la population, dans un contexte où l’on s’attendait à la mort naturelle du paganisme, auquel il ne s’agissait que de donner le coup de grâce. Ce fut en outre une prohibition des pratiques du culte qui ne visait pas les convictions personnelles.

Il n’était nullement interdit aux polythéistes de continuer à croire aux anciens dieux et de le dire dans leurs livres : les écrits néoplatoniciens fleurissent au contraire au IVe siècle sans que leurs auteurs soient inquiétés par l’État. Certains païens firent certes parfois l’objet de condamnations, mais toujours dans le cadre de conspirations politiques auxquelles ils étaient soupçonnés d’avoir participé. Au contraire de ce qui s’était passé lors de la persécution des chrétiens, il n’y a pas d’exemple de condamnations à mort prononcées pour des raisons religieuses.

Les cultes païens n’en ont pas moins fait l’objet de restrictions de plus en plus sévères dans la législation impériale du IVe siècle.

– Il y a là probablement une illusion d’optique, due au recueil ultérieur de ces textes dans le Code théodosien, une compilation réalisée au Ve siècle. Au IVe siècle, les empereurs chrétiens ont en réalité multiplié les mesures ponctuelles pour encadrer les anciens cultes. Il s’agit pour l’essentiel de rescrits, c’est-à-dire de réponses données par le gouvernement impérial aux autorités locales qui les interrogeaient sur les mesures applicables aux païens. Cela montre que les conflits religieux restaient à l’époque des affaires locales. La lecture du Code théodosien donne aujourd’hui le sentiment d’une législation insistante et répétitive, mais cette impression est anachronique. On a cru que les nombreuses réitérations contenues dans ces textes successifs montraient que les prohibitions n’étaient pas respectées, ce qui avait obligé les empereurs à revenir sans cesse sur le même sujet. On pense aujourd’hui qu’il s’agissait plutôt de mesures locales qui ne s’appliquaient pas à l’ensemble de l’empire.

Julien l'Apostat, durant un règne
de vingt mois (361-363),
 tenta d'opérer un retour
au paganisme
Il ne faut pas négliger non plus le fait que ces textes relèvent parfois aussi de la propagande. Au moment où l’empereur est amené à sévir contre un certain nombre de chrétiens en prenant parti dans leurs disputes théologiques, où il exile des évêques et met le bras séculier au service d’une partie de la hiérarchie ecclésiastique contre une autre, il est important pour lui d’apparaître, en promulguant de tels textes contre les païens, comme un intrépide défenseur de la foi. Ces textes étaient-ils, en pratique, strictement appliqués ? Il est difficile d’arriver, en la matière, à des conclusions générales. Ce qui est sûr, c’est que dans l’état actuel de la documentation, ils ne semblent l’avoir été ni partout ni tout le temps.

N’assiste-t-on pas, au moins, à une chasse aux sorcières visant à exclure les païens des hauts postes de l’administration ?

– Absolument pas. Des païens affichés ont occupé des postes considérables sous Constantin et ses fils et jusqu’à Théodose, pourtant réputé avoir fait du christianisme la religion de l’État romain. Le sénat de Rome est demeuré païen jusqu’à la fin du siècle et il n’en est pas moins resté la pépinière d’où les empereurs chrétiens tiraient les membres de la haute administration. Ami de l’empereur Julien, cet empereur qui avait entrepris, pendant ses trois années de règne, de restaurer le paganisme dans ses privilèges et de marginaliser les chrétiens, Libanios d’Antioche, qui était lui-même un païen engagé, a écrit un discours pour la défense des temples qui a pu laisser croire que les partisans de Julien avaient été victimes d’une épuration de la part de ses successeurs chrétiens.

Nous avons effectué à ce sujet un travail statistique en suivant leurs carrières après sa mort. Le résultat de cette approche quantitative est très clair : ils n’ont en aucun cas été victimes d’une chasse aux sorcières. Ils sont, au contraire, à deux ou trois exceptions près – dont la mise à l’écart s’est, encore une fois, expliquée par des considérations politiques, et non pas religieuses –, restés en place à des postes très importants.

Parmi les manifestations de l’intolérance chrétienne, on cite souvent l’exemple des destructions de temples, qui fait l’objet de témoignages recoupés, puisque des païens comme Libanios s’en plaignent, tandis que des auteurs chrétiens les célèbrent. Cela ne suffit-il pas à l’historien pour tenir de tels faits comme établis ?


– C’est un point d’histoire que l’archéologie permet de trancher. Il y a eu des destructions, dont la plus célèbre reste celle du Sérapéum d’Alexandrie. Mais elles n’ont pas eu le caractère systématique qu’on leur a prêté sur la foi d’une mauvaise interprétation des sources. Car ce qui est revendiqué dans des hagiographies chrétiennes comme une destruction délibérée, et donc significative d’un climat de violence religieuse, a souvent relevé de catastrophes naturelles, comme des séismes, ou d’accidents, comme des incendies.

La Vie de saint Martin écrite par Sulpice Sévère présente ainsi l’évangélisateur des Gaules comme un infatigable destructeur de temples. Il s’agit en réalité d’une récupération de phénomènes purement accidentels. Les écroulements ont été perçus par les chrétiens de l’époque comme autant de châtiments divins, suscités par la médiation du saint.


Il y a eu moins de destructions que d’abandons ou de réaffectations au culte chrétien. Celles-ci ont en réalité sauvé les bâtiments de la destruction à laquelle paraissait les vouer leur désaffectation.

On assiste en effet à l’époque à une séparation entre le culturel et le religieux, puisque les chrétiens prennent conscience de la beauté formelle des temples, comme de la valeur artistique des statues qui représentent les dieux païens et qu’ils acceptent, de ce fait, de participer à leur sauvegarde, non comme objets ou édifices de culte, mais comme objets d’art. Cette distinction constitue l’une des révolutions intellectuelles apportées par la christianisation. C’est elle qui permettra la sauvegarde du Parthénon ou celle du temple de Syracuse, intégré dans les murs de la cathédrale. Elle qui conduira Constantin et ses successeurs à peupler les rues de Constantinople avec des statues enlevées aux temples du paganisme. Parmi elles, la colonne serpentine de Delphes, que l’on peut voir encore aujourd’hui à Istanbul.

La christianisation n’a pas remis en question l’une des valeurs constitutives de la pensée antique, qui est le respect de l’héritage reçu des ancêtres. Elle a dès lors débouché sur l’émergence de la notion de patrimoine culturel. Cela se vérifie au IVe siècle dans la pratique, avant d’être sanctionné, au tournant du IVe et du Ve, par le droit, avec la publication de nombreuses lois prévoyant la sauvegarde des chefs-d’œuvre artistiques qui avaient été liés à l’exercice de la religion païenne.

[…]

Les grands sanctuaires oraculaires auraient dû logiquement être détruits, dans la mesure où ils étaient liés à des pratiques magiques qui faisaient l’objet de la plus forte réprobation, notamment de la part des autorités. On a souvent préféré les transformer en églises dédiées aux martyrs pour préserver l’identité locale, les traditions qui voulaient qu’ils soient des lieux de réunion et d’identification. Le christianisme a voulu éviter par là une rupture brutale qui aurait désorienté les populations.

En l’absence d’une véritable répression d’État, la persécution des païens n’a-t-elle pas été le fait de pogroms ou d’émeutes dont ceux-ci auraient été les victimes de la part des chrétiens ?

– De même qu’il faut distinguer dans l’action de l’État ce qui relève de la politique et ce qui relève de l’intolérance religieuse, il faut distinguer dans les mouvements sociaux ce qui relève de la violence sociale et ce qui relève de la violence religieuse. Les chrétiens sont en effet des acteurs du jeu social, dont toute l’identité ne se résume pas à leur appartenance religieuse, comme l’illustre l’affaire du lynchage d’Hypatie. Celle-ci est devenue la figure emblématique du paganisme persécuté par le christianisme.

 

Affiche du film Agora (2009)
Sans doute moins jeune et moins séduisante que ne l’a représentée le cinéma, c’était une philosophe assez éclectique qui enseignait à Alexandrie, au début du Ve siècle. Une spirale de violence avait alors entraîné dans une série de conflits les juifs et les chrétiens, le gouverneur d’Égypte, un chrétien du nom d’Oreste et le patriarche Cyrille d’Alexandrie. Dans ce contexte de tension, Hypatie fut, alors qu’elle se promenait en ville, agressée et lynchée, son corps étant même mis en pièces dans l’excitation de l’émeute par les moines du désert auquel le patriarche avait, comme ses prédécesseurs, pris l’habitude de faire appel pour marquer une forte présence dans les rues de la ville et exercer une certaine pression contre les adversaires du christianisme. Femme, philosophe, païenne et victime, Hypatie a pris depuis les Lumières une dimension mythique, tandis qu’était incriminée la responsabilité directe d’un patriarche devenu l’un des Pères de l’Église.

L’exemple est spectaculaire et il a quelque chose de terrible. Mais lorsqu’on lui applique une stricte méthode historique, on est obligé de constater qu’il a été surinvesti pour prêter une signification exemplaire à un cas isolé dans l’histoire du christianisme, mais commun dans celle d’Alexandrie, de manière à donner une consistance à des présupposés que rien d’autre ne justifie. Si l’on fait des lectures croisées de l’événement, si on le contextualise, on constate qu’il n’est pas réductible à une opposition entre écoles philosophiques païennes et Église, puisque Hypatie comptait des chrétiens parmi ses élèves, notamment Synésios de Cyrène, futur évêque de Ptolémaïs. On découvre que l’événement n’a eu qu’une portée locale, l’empereur n’en ayant nullement été saisi, ce qui n’aurait pas manqué si un personnage aussi considérable que le patriarche avait été impliqué dans l’affaire. On doit rappeler par ailleurs que le contexte alexandrin est traditionnellement d’une extrême violence et que les émeutes de rue étaient considérées par les contemporains comme des phénomènes endémiques à Alexandrie : on y avait déjà coupé des femmes en morceaux aux IIe et IIIe siècles, et même, auparavant, à l’époque hellénistique, du temps de Cléopâtre.


Il s’agit donc d’un lynchage commis au cours d’une émeute dans une ville en ébullition du fait de la violence des tensions intercommunautaires, et non de la mise à mort symbolique d’une figure de la philosophie, qui serait symptomatique de la volonté d’éradiquer le paganisme. Le film Agora qui a été l’un de nos points de départ attribue son exécution aux parabalani, qu’il représente comme une milice au service du patriarche, sur le modèle de ce qu’ont pu être les gardiens de la Révolution dans l’Iran de l’ayatollah Khomeiny. Il s’agissait en réalité d’une confrérie charitable liée au patriarche, formée de jeunes gens de la bonne société, et dont l’essentiel de l’activité consistait à soigner gratuitement les malades indigents. Le seul indice existant à leur encontre est une loi postérieure de plusieurs années, qui a encadré plus strictement leurs conditions de recrutement et limité leur dépendance vis-à-vis du patriarche. C’est un peu léger pour prétendre qu’ils avaient joué un rôle de premier plan dans la mise à mort d’Hypatie.

La destruction de la synagogue de Callinicon par des moines chrétiens de Syrie en 388, est un autre symbole de l’intolérance chrétienne. L’affaire était remontée jusqu’à l’empereur, qui avait ordonné à l’évêque du lieu de faire reconstruire immédiatement la synagogue en question, mais il en avait été dissuadé par saint Ambroise, qui l’avait exhorté à laisser les choses en l’état. L’épisode ne témoigne-t-il pas de l’émergence d’un certain antijudaïsme chrétien ?

– Il faut, là encore, appliquer la méthode historique. Or, lorsqu’on considère le dossier dans son ensemble, on constate qu’une chapelle de valentiniens, des dissidents chrétiens, avait été détruite dans le même mouvement. Cela conduit à considérer que s’il y a bien là un cas d’intolérance religieuse et d’engagement de certaines factions monastiques dans des manifestations de violence, il ne s’agit pas pour autant d’une manifestation d’antisémitisme.

Il faut aussi rappeler que le judaïsme était resté, dans l’empire chrétien, ce qu’il était depuis César et Auguste : une religion licite. De grandes synagogues monumentales furent construites au IVe siècle en Palestine et en Asie Mineure. Dans ce contexte, la réaction d’Ambroise de Milan paraît moins relever de l’antijudaïsme que de la volonté, traditionnelle sous l’empire, d’entraver le prosélytisme juif. 

S’ils n’ont pas véritablement persécuté le paganisme ou le judaïsme, les empereurs chrétiens sont en revanche intervenus dans les affaires internes de l’Église. Qu’est-ce qui les y a conduits ?

– La préoccupation majeure des empereurs est là encore celle de l’unité romaine. Inaugurant le concile de Nicée en 325, Constantin fait un parallèle entre son action militaire pour mettre fin aux périls extérieurs et la nécessité d’assurer la paix à l’intérieur en réglant les conflits internes au christianisme. Le bonheur de l’empire dépend de la paix avec la divinité qui est au ciel. Celle-ci ne peut considérer qu’avec horreur les dissidences.

En s’efforçant d’y mettre fin, les empereurs ne cessent donc pas de faire de la politique. Ils y sont appelés par les chrétiens eux-mêmes – donatistes, ariens ou orthodoxes –, toutes communautés confondues. Plus que leur propre point de vue, ils appliquent très généralement l’avis de la majorité des évêques, tel qu’il se dégage des conciles. Ils fondent l’unité sur la majorité, comme c’était la règle dans la Cité antique.

Le comportement des empereurs est, en outre, conditionné par ce qu’il y a de plus traditionnel dans la mentalité romaine, qui est la théologie de la Victoire : l’idée que les succès que l’on remporte sur cette terre sont dus au premier chef à la faveur divine. C’est ce que pensaient jusqu’à la fin du IIIe siècle les empereurs païens qui persécutaient les chrétiens parce qu’ils refusaient de rendre aux anciens dieux le culte qui leur était dû. C’est ce que croient aussi Constantin et ses successeurs. Constantin est convaincu que c’est le Dieu des chrétiens qui lui a donné la victoire sur ses adversaires et que cela lui crée donc, envers lui, des obligations. Les honneurs rendus à la divinité ne relèvent pas seulement pour lui de la reconnaissance, ils sont la condition même de ses succès à venir, et par là, de la paix et du bonheur de l’empire. En intervenant dans les querelles religieuses, les empereurs chrétiens ne croient pas, dès lors, se détourner de leurs devoirs de chefs d’État, mais au contraire les accomplir.

Parmi les idées reçues, domine celle qu’à la racine de l’intolérance chrétienne se trouverait le fait que les religions de foi seraient englobantes et persécutrices, à l’opposé du polythéisme, dont l’absence de doctrine garantirait au contraire le « libéralisme ».

C’est toute la pensée antique qui est par nature englobante, au contraire. Le souci de l’unité y prime celui de la liberté individuelle. La Cité grecque est intolérante : elle l’a montré en mettant à mort Socrate parce qu’il ne respectait pas les dieux de la Cité. La liberté y est circonscrite à la sphère du privé, où l’on reste libre de penser ce que l’on veut pourvu qu’on ne fasse pas état des opinions dissidentes et que l’on participe aux manifestations publiques qui sont constitutives du vivre ensemble.

Un courant historiographique marqué, aux États-Unis, par la prise de conscience de la menace islamiste tend aujourd’hui à identifier foi et intolérance. Les djihadistes du Hamas et les démolisseurs des bouddhas de Bamiyan y ont influencé le regard posé sur les moines syriens du IVe siècle, comme si tous les monothéismes étaient à la fois identiques et monolithiques, dans toutes les régions du monde et dans tous les temps. Il s’agit d’une grille idéologique qui déforme notre regard sur l’histoire.



Chrétiens persécuteurs
sous la direction de Marie, Françoise Baslez
avec Jaime Alvar, Philippe Blaudeau, Jean Bouffartigue, Bernadette Cabouret, Béatrice Caseau, Laurent Guichard, Pierluigi Lanfranchi, Yann Le Bohec, Pierre Maraval, Clelia Martinez Maza, Sébastien Morlet, Capucine Nemo-Pekelman, Christian R. Raschle, François-Xavier Romanacce et Emmanuel Soler.
Destructions, exclusions, violences religieuses au IVe siècle
publié chez Albin Michel
le 7 mai 2014,
à Paris
460 pages
25 €

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Non, les Jeux olympiques antiques n'ont pas disparu à cause d'un édit antipaïen de l'empereur Théodose Ier

mercredi 16 octobre 2024

Kamala Harris et ses cinq années d'adolescence passées à Montréal (m à j)

Dans un long profil hagiographique sur Kamala Harris, le Washington Post ajoute ces détails:

Le gouvernement du Parti québécois de René Lévesque prit le pouvoir en 1976, l'année même où la mère de Kamala Harris déménagea à Montréal pour y travailler à l'université McGill. Le Washington Post note qu'en 1978, la Westmount High School [dans la banlieue très cossue anglophone de Westmount], où Harris était inscrite, accueillit un important contingent d'élèves noirs à faible revenu, dont les écoles de langue anglaise allaient fermer leurs portes.

En tant que personne d'origine noire et indienne, sans parler de son statut d'étrangère aux États-Unis, Mme Harris serait devenue la cible d'insultes raciales.

« Elle a été victime de brimades dans une certaine mesure », a déclaré Jamie Ward, un camarade de classe de Westmount, au journal, tout en refusant d'entrer dans les détails. « Je ne répéterais jamais cela. Moi-même étant biracial, c'est nuisible et blessant ».

Mais le journal affirme que Kamala Harris aurait été endurcie par les épreuves. « La vie quotidienne dans le Montréal de la fin des années 1970 et du début des années 1980 a montré à Kamala Harris les conséquences concrètes d'une profonde division politique, tandis que les éruptions de conflits à son école secondaire lui ont fait comprendre la réalité du racisme auquel elle serait confrontée en tant que femme biraciale », écrit le quotidien.

L'article se poursuit : « Harris affina ses premiers instincts politiques alors qu'elle affrontait les brutes du lycée et une atmosphère politique en ébullition, émergeant, selon ses camarades de classe, comme une étudiante confiante et populaire au-delà des lignes raciales. »



Billet du 23 juillet

Kamala Harris, dans son livre Nos vérités : Mon rêve américain (2019), fait largement l’impasse sur ses années passées à Montréal, où elle a terminé ses études primaires avant de faire son secondaire à la Westmount High School. Non seulement la native d’Oakland expédie-t-elle son expérience montréalaise en moins de 400 mots — dans un livre de 352 pages —, mais elle ne retient qu’un seul souvenir positif de son séjour québécois et aucun de son expérience à l’école secondaire de Westmount, dont elle ne mentionne même pas le nom.

« J’étais heureuse là où j’étais », écrit-elle après avoir raconté son enfance à Oakland, où sa mère d’origine indienne, divorcée de son père né en Jamaïque en 1938. Donald Jasper Harris est un économiste jamaïcain-américain et professeur émérite à l'université Stanford.

« Mais quand j’étais [en sixième année, en 1976], nous avons dû partir. Ma mère s’était vu offrir une occasion unique à Montréal : enseigner à l’Université McGill et poursuivre ses recherches [sur le cancer du sein] à l’Hôpital général juif. C’était une étape excitante dans la progression de sa carrière. Ce n’était pas, cependant, une occasion excitante pour moi. J’avais 12 ans, et l’idée de quitter la Californie ensoleillée en février, au milieu de l’année scolaire, pour aller dans une ville étrangère d’expression française ensevelie sous 12 pieds de neige m’était pour le moins pénible. » [12 pieds = 3,65 mètres, devenus 12 cm dans un article du 17 août 2020 du Monde... C'est inexact. Il tombe en réalité en moyenne un peu plus de 2 mètres de neige par an à Montréal, mais comme la neige fond certains jours en hiver et se tasse, il n’y a jamais plus d’un mètre [102 cm] de neige au sol là où la neige n’est pas accumulée en congères, souvent beaucoup moins.]

Sa mère, la doctoresse Shyamala Gopalan Harris, titulaire d’un doctorat en endocrinologie et nutrition de l’Université de Californie à Berkeley, a passé 16 ans à Montréal, à l’Hôpital général juif et à la Faculté de médecine de l’Université McGill. Mme Gopalan Harris est décédée en 2009. La famille a habité une maison victorienne sur l’avenue Grosvenor.

L’impression d’être une cane (coin, coin) à l’école francophone

Selon Kamala Harris, le choc du déracinement a été d’autant plus grand que sa mère, Shyamala, a insisté pour que sa sœur cadette Maya et elle aillent à l’école primaire Notre-Dame-des-Neiges, fréquentée par des petits Montréalais francophones.

Elle écrit : « Cela a été une transition difficile, étant donné que le seul français que je connaissais venait de mes cours de danse, où madame Bovie, ma professeure de ballet, criait : “Demi-plié, and up !” J’avais l’impression d’être un canard, car durant toute la journée à notre école, je répétais : “Quoi ? Quoi ? Quoi ?” »

Sa mère a mis fin à ses difficultés linguistiques en la transférant dans une école anglophone.

Passage par une école artistique

Kamala Harris et sa jeune sœur Maya ont fréquenté la FACES (Fine Arts Core Elementary School) en 1977-1978 (et peut-être pendant une partie de l’année scolaire précédente, 1976-1977). Harris est alors en huitième année.

Comme l’école accueillait seulement les élèves jusqu’à la 8e année à l’époque, les élèves étaient ensuite obligés de changer d’école. Plusieurs d’entre eux, parmi lesquels Kamala Harris, se retrouvèrent à l’école secondaire de Westmount.

Harris se plaignait de ses cours de français

Kamala Harris fréquenta l’École secondaire de Westmount de 1978 à 1981. L’école secondaire de Westmount (en anglais Westmount High School), est une école secondaire publique située dans le quartier très aisé de Westmount, au Québec. L’école a été construite en 1961.

Kamala Harris, au centre en chemisier blanc et veste beige, photographiée en 1981 avec ses camarades de classe à l’école secondaire de Westmount

Selon le New York Times, « ses amis d’enfance se souviennent d’une jeune femme sûre d’elle, qui manifestait des velléités de militantisme, trouvait une affirmation culturelle dans son identité noire et se plaignait du cours de français. »

Cégep anglophone

Kamala Harris a également brièvement fréquenté le Cégep anglophone Vanier l’année suivante en 1982. Le cégep correspond à un collège pré-universitaire et post-secondaire. La première année du cégep correspond à la terminale du lycée en France.

Nostalgie des États-Unis dans son livre lancé pour sa candidature à la présidence des États-Unis

 « Au moment d’arriver au secondaire, je m’étais adaptée à notre nouvel environnement […] Ce à quoi je ne me suis jamais habituée, c’est le sentiment de nostalgie pour mon pays », écrit Kamala Harris avant d’enchaîner sur sa décision inéluctable de faire ses études universitaires aux États-Unis, où elle a d’abord fréquenté l’Université Howard, surnommée la Black Harvard, avant de s’inscrire à l’École de droit Hastings de l’Université de Californie.

Kamala Harris relie à son éducation auprès des amis militants de sa mère à Oakland sa seule anecdote positive concernant son séjour à Montréal. « Un jour, Maya et moi avons organisé une manifestation devant notre immeuble pour protester contre le fait que les enfants n’étaient pas autorisés à jouer au soccer sur la pelouse. Je suis heureuse de rapporter que nos demandes ont été acceptées », écrit-elle.


Kamala parmi ses camarades de promotion en 1981 (livre des diplômés de l’école). Elle y dit la nostalgie persistante pour son pays natal, quand elle cite encore « la Californie » au rang de ses « meilleurs souvenirs », mais elle témoigne aussi des bons moments vécus, en confiant que son passe-temps préféré est de « danser avec la bande des six, les Midnight Magic » — une troupe de danse montée avec cinq copines, qui se produit dans des maisons de retraite ou dans des galas de collecte de fonds.

Kamala Harris est la descendante d'un propriétaire d'esclaves irlandais en Jamaïque

Des recherches menées par un historien irlandais révèlent que l'ancêtre du vice-président américain, Hamilton Brown, propriétaire d'esclaves, est né dans le comté d'Antrim en 1776.

Mme Kamala Harris est la fille de Donald J. Harris, né en Jamaïque, et de Shyamala Gopalan Harris, originaire d'Inde.

Des recherches généalogiques menées par l'historien nord-irlandais Stephen McCracken ont révélé que le quadruple arrière-grand-père paternel de Mme Harris, Hamilton Brown, est né dans le comté d'Antrim en 1776, l'année de la Déclaration d'indépendance des États-Unis.

Brown a émigré en Jamaïque, alors colonie britannique, et est devenu un propriétaire d'esclaves enthousiaste dans les plantations de sucre qui constituaient le pilier de l'économie de l'île. Il s'opposa à l'abolition de l'esclavage dans tout l'Empire britannique en 1832 et se rendit à Antrim pour remplacer ses esclaves par des travailleurs de son comté natal.

Il a donné son nom à Brown's Town en Jamaïque et est enterré à l'intérieur de l'église anglicane St Mark, qu'il a construite avec ses propres fonds.

Le père de Mme Harris, professeur émérite d'économie à l'université de Stanford, a reconnu le passé esclavagiste de sa famille dans un article publié dans un journal jamaïcain en 2018. Curieusement, sa mère s'appelle Finegan. Les ancêtres irlandais du président Joe Biden s'appellent également Finegan (Finnegan).

Donald Harris a écrit : « Mes racines remontent, de mon vivant, à ma grand-mère paternelle, Miss Chrishy (née Christiana Brown, descendante de Hamilton Brown, dont on sait qu'il était propriétaire de plantations et d'esclaves et fondateur de Brown's Town) et à ma grand-mère maternelle, Miss Iris (née Iris Finegan, agricultrice et éducatrice, originaire d'Aenon Town et d'Inverness, dont l'ascendance m'est inconnue).

« Le nom Harris vient de mon grand-père paternel, Joseph Alexander Harris, propriétaire terrien et exportateur de produits agricoles (principalement du piment ou du quatre-épices), qui est décédé en 1939, un an après ma naissance, et qui est enterré dans la cour de la magnifique église anglicane construite par Hamilton Brown à Brown's Town (et où, enfant, j'ai appris le catéchisme, j'ai été baptisé et confirmé, et j'ai servi en tant qu'acolyte) ». 

La mère indienne de Kamala Harris et son père professeur d'économie d'origine jamaïcaine

Burnard, qui a écrit un livre sur le surveillant d'esclaves jamaïcain Thomas Thistlewood, nous dit que si le père de Kamala Harris dit qu'il est un descendant d'Hamilton Brown, « je serais enclin à le croire ».

Il ne serait pas inhabituel que Kamala Harris ait « un certain héritage de propriétaire d'esclaves », a déclaré M. Burnard. « Ce serait tout à fait normal pour les membres de la classe moyenne jamaïcaine, en particulier l'élite éduquée, d'où vient Kamala Harris.

Jessian Prince, que l'arbre généalogique identifie comme la mère de Miss Crishy et qui serait donc l'arrière-arrière-grand-mère de Kamala Harris, figure sur les registres de naissance et de décès en tant qu'« ouvrière ». Selon M. Zoellner, les travailleurs de la Jamaïque à cette époque étaient presque toujours « des personnes d'origine africaine, enfants et petits-enfants de personnes asservies qui avaient été libérées en 1838 ».

Voir aussi

Ce groupe de discussion composé de femmes du Wisconsin consulté par la chaîne MSNBC (plutôt démocrate) a été brutal envers Kamala Harris.

Elise Jordan : « Comment percevez-vous la vice-présidente Harris par rapport au président Biden en termes de compétence et d'expérience ? »
Groupe de discussion : « Je pense qu'elle est pire ».
« Elle ne sait même pas ce qui se passe à la frontière. Or, c'est ce qu'elle était censée faire. »

Elise Jordan : « Y a-t-il quelqu'un que Kamala Harris pourrait nommer vice-président et que vous trouveriez rassurant ? »
Groupe de discussion : « Je n'envisagerais jamais de voter pour elle. Je penserais à RFK Jr bien avant de voter pour elle ».

Elise Jordan : « Quand pensez-vous que l'Amérique aura une femme présidente ? »
Groupe cible : « Quand il y en aura une compétente ».
« Je ne la sens pas bien. »
« Je pense que c'est une idiote. »

Elise Jordan : « Pourquoi pensez-vous qu'elle n'est pas très intelligente ? »
Groupe de discussion : « Parce qu'elle n'a rien fait pendant le temps qu'elle a eu. Elle n'est pas très intelligente.»

Les origines indiennes de Kamala Harris :

Certificat de naissance de Kamala Harris (mère de race/couleur « caucasienne », père de race/couleur « jamaïcaine »)

Éric Zemmour adapte son succès Le Suicide français en une mini-série de documentaires pour Canal+

Selon Le Parisien, l’ex-candidat à la présidentielle s’est lancé dans le tournage d’une série documentaire adaptée de son livre Le Suicide français.


Éric Zemmour de retour devant les caméras. Dix ans presque jour pour jour après la sortie du « Suicide français », l'écrivain et président du parti Reconquête en prépare l’adaptation télévisuelle. Selon les informations du quotidien, il vient de donner le coup d’envoi, à Paris, du tournage d’une mini-série documentaire de quatre épisodes de 52 minutes. Il s’agit de l’adaptation de son essai sorti en octobre 2014 et écoulé alors à 500 000 exemplaires. L’information a, depuis, été confirmée par Diane Ouvry, attachée de presse d’Éric Zemmour.

En costume cravate sombre, écharpe bleu ciel lui protégeant la gorge entre les prises, il enregistrait ce mardi 15 octobre, au matin, une séquence au jardin mémorial des enfants du Vél d’Hiv (XVe arrondissement de Paris). Face à son équipe technique, il répétait son texte où il était question du Maréchal Pétain et de Jacques Chirac, qui a reconnu la responsabilité de l’État Français dans la rafle de juillet 1942. La veille, Éric Zemmour tournait rue Nicolas Appert, dans le XIe arrondissement de la capitale, là où siégeait la rédaction de l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo jusqu’à l’attentat islamiste de janvier 2015, qui a coûté la vie à 12 personnes.

La série adaptée du « Suicide français » est destinée à être diffusée sur les antennes du groupe Canal+ dans un an au plus tôt. C’est la chaîne Planète+, consacrée aux documentaires notamment historiques, qui a été choisie par les dirigeants du groupe propriété de l’homme d’affaires breton Vincent Bolloré. Le documentaire est produit par Pallas Télévision, société de production d’Éric Pierrot, qui assure d’habitude des sujets pour les magazines « Zone interdite », « Capital » ou « Arnaques » de M 6, ou pour la chaîne France 5 et qui a signé en 2022 pour C8 « Le Puy du Fou raconté par Philippe de Villiers ».

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Zemmour : « Les hommes du passé sont, sur bien des points, supérieurs à nous »

Zemmour : « Le Suicide français »

Zemmour bat tous les records de vente ! 

Éric Zemmour et le Suicide français vus par Mathieu Bock-Côté et un sondage

Le secteur automobile européen est mal en point (en cause le passage à l'électrique)


La bascule vers l’électrique déstabilise le monde de l’auto

L’inquiétude grandit chez les constructeurs et les équipementiers face à la désaffection des clients, peu enclins à adopter cette nouvelle motorisation.

L’édition 2024 du Mondial de l’automobile ouvre ses portes ce lundi pour une semaine à Paris, avec la participation de la plupart des grands constructeurs, qui présenteront en avant-première une cinquantaine de nouveaux modèles. Cet événement se tient dans une période très difficile pour le secteur, qui doit gérer sa conversion industrielle accélérée vers l’électrique, sans que la demande soit au rendez-vous. Craignant une nouvelle crise, plusieurs groupes ont commencé à prendre des mesures de restructuration.

Côté face, l’édition 2024 du Mondial de l’auto s’annonce comme une grande fête de l’automobile. Déserté il y a deux ans par les Allemands, les Japonais et les Américains, le Salon de l’automobile de Paris a réussi cette année à attirer tous les grands noms de l’industrie auto. Tesla a répondu présent, comme Ford. Cadillac, la marque mythique de GM, présentera ses modèles électriques. Le groupe Volkswagen est là avec Audi et Skoda. BMW aussi, comme le coréen Kia. Les chinois BYD, Xpeng, MG (Saic) ne ratent aucune exposition occidentale. Renault est chez lui avec les derniers modèles de Dacia, Alpine et un prototype du Losange. Stellantis a cette fois fait briller quelques-unes de ses quinze marques (Peugeot, Citroën, Alfa Romeo), dont la chinoise Leapmotor, un constructeur dans lequel il a pris une participation de 21 % au capital.

Mais côté pile, l’inquiétude est à son comble. Fermetures d’usines programmées chez Volkswagen, Audi, Valeo ; chômage partiel chez Fiat et Michelin, projets d’usines de batteries repoussés, amendes de l’union européenne en perspective… Les constructeurs européens et derrière eux tous les équipementiers et sous-traitants s’alarment d’une nouvelle crise.

Celle-ci n’a rien à voir avec celle qui avait frappé l’industrie après le Covid : le manque de composants et de semi-conducteurs ainsi que l’inflation avaient contraint la production. Les prix des véhicules avaient alors grimpé assurant de jolies marges aux industriels. Cette fois, les clients ne sont plus au rendez-vous. En France, les 139.003 ventes de véhicules particuliers neufs du mois de septembre sont les plus faibles enregistrées depuis vingt ans. Et les immatriculations sur neuf mois marquent encore un recul de 23% par rapport à 2019. Le marché du véhicule neuf en France porte sur 1,8 million d’unités aujourd’hui. C’était 2,2 millions en 2019.

« Deux indicateurs illustrent la crise actuelle, explique Olivier Hanoulle, consultant automobile au cabinet Roland Berger. D’une part, les volumes de production en Europe : en 2024, ils devraient atteindre 17,2 millions de véhicules légers. Le niveau le plus bas avait été atteint en 2020 à 16,6 millions de véhicules. Nous en serons finalement assez proches. Le deuxième indicateur est la rentabilité. En 2024, les marges vont terriblement diminuer.» De fait, les uns après les autres, Volkswagen, Stellantis, Mercedes, BMW, Aston Martin ou encore l’équipementier Forvia ont revu à la baisse leurs prévisions pour l’année 2024. La marge de Stellantis, champion des profits, va passer de 14 % en 2023 à une fourchette comprise entre 5,5 % et 7% en 2024. Les groupes allemands tiraient une part importante de leurs bénéfices de leur présence en Chine, leur premier marché. Ils sont désormais en difficulté. Les groupes chinois les éclipsent progressivement et les privent de leur rente.

Des constructeurs sous pression


L’année prochaine ne réservera pas de jours meilleurs aux industriels occidentaux. La réglementation européenne sur les émissions de CO2 promet de les mettre encore davantage sous pression. La part des véhicules électriques dans leurs ventes va devoir grimper de manière très importante pour leur éviter des amendes douloureuses. Ils doivent parvenir à réduire de 15% supplémentaires les émissions moyennes de CO2 sur l’ensemble des ventes de véhicules neufs réalisées au cours de l’année prochaine. Or ces derniers mois, la trajectoire d’adoption des véhicules 100% à batterie (BEV) s’est affaissée. En Europe, leur part a fondu pour atteindre 12,6% du marché. Elles devraient atteindre 22 % pour éviter les pénalités européennes en 2025.

Combien risquent-ils de devoir acquitter ? Le cabinet de conseil Alix Partner a étudié trois scénarios plus ou moins tendus pour estimer le montant global des amendes. Dans tous les cas, la facture risque d’être salée. Les pénalités atteindraient entre 28 milliards d’euros et 75 milliards d’euros cumulés pour la période 2025-2029. Elles dépendront aussi du succès des nouveaux modèles électriques «abordables» (R5, ë-c3…) promis par les grands groupes et livrés à partir de l’an prochain.

L’ONG Transport & Environment (T&E), qui défend une décarbonation accélérée des transports, est plus optimiste. Selon elle, les ventes de BEV devraient atteindre 24 % de part de marché en 2025 (contre 14 % au premier semestre 2024). Elles seraient soutenues par une expansion de l’offre sur le marché de masse avec sept modèles abordables à moins de 25.000 euros. Seuls Ford et Volkswagen peineraient à atteindre les seuils requis d’après ses prévisions.

Les raisons du désamour des clients pour les voitures électriques sont nombreuses. Mais Carlos Tavares, le patron de Stellantis, pointe lui-même la plus importante : « Elles sont trop chères, s’exclamait-il à Sochaux il y a quelques jours devant des journalistes. Tous les problèmes liés à l’usage de ces voitures sont en train d’être résolus un par un : le prix de l’électricité par rapport au prix de l’essence par exemple. Or le problème du prix, c’est un problème de coût », argumente le dirigeant.

Les groupes chinois à l’offensive

Produire un véhicule électrique coûte toujours environ 40 % plus cher qu’un véhicule à essence en raison de sa batterie, mais aussi des volumes encore trop maigres pour réaliser les économies d’échelle. Résultat, quasiment tous les petits véhicules électriques sont assemblés en Europe de l’est. La ë-c3 de Citroën est produite en Slovénie. Le chinois Leapmotor s’est installé en Pologne à Tychy, chez Stellantis. La nouvelle Twingo à batterie sera fabriquée en Slovaquie à partir de 2026.

Toutes les marques réclament le maintien d’incitations versées par les États pour soutenir l’achat des voitures zéro émission. Mais les politiques de rigueur budgétaire se sont invitées dans les agendas de nombreux gouvernements. En Allemagne, la suppression des aides en décembre 2023 a fait couler les ventes : -68 % en août dernier. En France, l’enveloppe de 1 milliard et demi consacrée au bonus écologique et à la location sociale (avec option d'achat) sera rabotée d’un tiers… tandis que le malus sera étendu à de nombreux véhicules thermiques populaires. Certes, le bonus ne profitera pas aux modèles produits en Chine depuis qu’il est soumis à des critères environnementaux (production, transport…). Pour se protéger d’un déferlement de véhicules électriques chinois - qui représentent aujourd’hui une part de marché de 3 % -, l’Union européenne n’a pas retenu le critère écologique choisi par la France. Elle a privilégié les barrières douanières établies en fonction des subventions perçues par les groupes chinois auprès de l’État et de leur coopération lors de l’enquête menée par la Commission. Ainsi Saic, qui possède MG, devra payer 35,3 % de droits de douane supplémentaires qui s’ajoutent aux 10 % déjà fixés, Tesla 7,8 %, BYD 17 % et Geely 18,8 %.

Mais malgré ces taxes, les groupes chinois sont déterminés à poursuivre leur offensive sur le Vieux Continent. Ainsi la marque MG affirme qu’elle maintiendra ses prix pratiqués l’an dernier jusqu’à la fin de l’année. Par ailleurs, les nouveaux droits de douane ne s’appliqueront pas aux véhicules hybrides et hybrides rechargeables dont le succès ne se dément pas alors qu’ils doivent être bannis en 2035. De plus, les BYD, Chery, Leapmotor, Saic… installeront très prochainement leurs usines en Europe et échapperont ainsi aux taxes. Les projets sont lancés en Hongrie et en Espagne. « Le gâteau est devenu plus petit et nous avons plus d’invités à table, résumait Oliver Blume, le patron du groupe Volkswagen dans une interview à Bild. Il se vend moins de voitures en Europe. Dans le même temps, de nouveaux concurrents asiatiques occupent le marché, notamment chinois. »

Les dirigeants de Stellantis, Renault et leurs homologues n’hésitent plus à parler de leur « survie ». Dans ce contexte, les constructeurs et les équipementiers réclament que « les discussions prévues en 2026 dans le cadre de la clause de revoyure (destinée à réexaminer la trajectoire de décarbonation, NDLR) - avec la Commission démarrent dans les meilleurs délais », selon les mots de Luc Chatel, le président de la PFA, entité qui coiffe les entreprises françaises de la filière automobile. La déprime risque de s’inviter dès la fin du Mondial.

Source : Le Figaro

mardi 15 octobre 2024

Théorie du genre dans les écoles québécoises: des parents inquiets tirent la sonnette d’alarme

Outils pédagogiques problématiques au Québec : des parents se plaignent au Réseau éducation, sexe et identité. Entrevue avec Athena Davis, co-coordinatrice du Réseau éducation, sexe et identité (RESI).


Critique de la définition du sexe dans un manuel approuvé par le ministère de l'Éducation du Québec

François Chapleau, professeur émérite de biologie, a écrit au ministère de l'Éducation afin de recommander des changements dans les manuels scolaires.

Dans sa lettre, il explique pourquoi la définition du "sexe" donnée est erronée. Il offre ce que pourrait être une définition scientifique du "sexe" pour le programme. Finalement, il critique le processus de vérification du programme du ministère.

Comme il s'agit d'un dossier d'intérêt public qui devrait intéresser tous les parents et élèves, il a rendu cette lettre publique.

Le 13 octobre, 2024

M. Martin Cléroux, directeur
Direction des ressources didactiques et des bibliothèques scolaires
Ministère de l’Éducation
1035, rue de la Chevrotière, 13e étage
Québec (Québec) G1R 5A5

Cher Monsieur,

Merci pour votre réponse du 30 juillet 2024[1] à ma lettre du 23 mai[2] au ministre de l’Éducation concernant la définition pseudoscientifique du mot « sexe »[3] dans le manuel de 5e année de la collection Passeport Citoyen de la maison ERPI pour le programme Culture et citoyenneté québécoise (CCQ).

Dans votre réponse, vous avez indiqué que le manuel concerné était encore en cours d’approbation ce qui sous-entendait que la version controversée de la définition du mot « sexe » n’était pas approuvée.

Vous avez également écrit que : « Le programme [CCQ] a été approuvé au terme d’un processus de vérification rigoureux impliquant de nombreux experts des domaines de référence en éducation, en philosophie et en sociologie. » [Aucun en biologie...]

Les manuels de la série Passeport Citoyen ont finalement été approuvés le 2 septembre 2024. La définition du mot « sexe » a été modifiée et correspond maintenant à la nouvelle définition du programme CCQ[4]. Le sexe serait une : catégorie qui répartit la population entre femmes et hommes à partir de caractéristiques physiologiques.

Malheureusement, cette définition n’a aucun lien véritable avec la réalité du sexe dans le monde vivant (incluant l’humain). On n’y indique même pas son rôle fondamental dans la reproduction. Il semble donc que vous n’ayez pas de véritable expert en sciences naturelles ou en biologie dans votre équipe de vérification. C’est une grave omission et cela invalide votre processus de vérification sur ce sujet.

1. Critique de la définition du mot «sexe » du programme CCQ

La définition de « sexe » en tant que « catégorie », nécessite l’ajout d’un qualificatif et une explication puisqu’une catégorie peut prendre plusieurs formes[5]. Le sexe est une catégorie « biologique » qui s’appuie sur une propriété universelle de la reproduction sexuée (par rapport aux autres modes de reproduction) qui est : la fusion de deux gamètes de tailles distinctes pour former un nouvel individu[6]. Cette réalité doit être communiquée aux élèves.

En plus d’être anthropocentrique (il y a plus d’un million d’espèces à reproduction sexuée), le fait d’indiquer que le sexe « répartit la population entre hommes et femmes » est tout simplement faux. Le sexe ne « répartit » rien, il est au cœur du processus de production de mâles et de femelles (c’est-à-dire, la reproduction sexuée). Et puisqu’il n’y a que deux sexes, il est toujours binaire. Ainsi, il aurait été préférable de dire que la catégorie « sexe » chez les humains est « constituée » de deux catégories d’individus, les mâles et les femelles, qui se distinguent, non pas par des « caractères physiologiques »[7], mais par une anatomie qui produira l’un ou l’autre des deux types de gamètes. Il s’agit donc ici de deux catégories bien délimitées, bien ancrées dans la biologie et le monde réel. Et, vous en conviendrez, nos enfants sont en droit d’avoir une éducation fondée sur la réalité.

Bien que dans des cas extrêmement rares, l’identification du sexe d’une personne peut être complexe, aucune anomalie du développement sexuel[8] et aucun enjeu social[9] ne peuvent remettre en question la réalité strictement binaire du sexe. Or, jamais le caractère strict de cette réalité n’est affirmé dans le programme CCQ, dans les manuels associés[10] ou dans le matériel connexe produit par des partenaires d’enseignement[11]. Ainsi, nulle part, les mots « femme » et « homme » ne sont définis. Cela invisibilise la réalité biologique de ces mots qui est pourtant importante dans nos sociétés (médecine, espace sécuritaire pour les femmes, sports féminins, éducation des enfants, etc.). Ces omissions sont indignes d’un programme qui prétend être ancré dans la réalité et l’esprit critique. Nos enfants méritent mieux.

2. Vers une définition scientifique du mot « sexe » pour le programme CCQ

Le sexe pourrait être défini comme suit[12] :

Sexe : terme lié au processus de formation d’un nouvel individu dans le cadre de la reproduction sexuée. Le sexe est « binaire » parce que la reproduction sexuée nécessite toujours deux types de gamètes de tailles distinctes pour la production, lors de la conception, d’un nouvel individu. Ainsi, 

  1. le sexe mâle correspond à l’individu (ou la structure[13]) dont l’anatomie a évolué pour la production de petits gamètes (spermatozoïdes ou pollen) et 
  2. le sexe femelle correspond à l’individu (ou la structure) dont l’anatomie (ou la structure) a évolué pour produire de gros gamètes (ovules, ovocytes ou œufs).

Note : Il n’existe pas de 3e type de gamète ou de 3e sexe.

Chez l’humain, 

  • la trajectoire développementale mâle ou femelle est déterminée à la conception, par l’assemblage des chromosomes sexuels provenant des deux gamètes[14]. 
  • une fois le sexe déterminé chez un humain, la trajectoire développementale de l’autre sexe est activement inhibée[15], 
  • l’appartenance à un des deux sexes est définitive et immuable, 
  • cette appartenance est inscrite dans chaque cellule du corps, 
  • cette appartenance fait partie de l’identité de chaque personne puisqu’elle a une influence sur les comportements et les attitudes, 
  • la femme est la femelle adulte de notre espèce, et 
  • l’homme est le mâle adulte de notre espèce.

Toutes les caractéristiques humaines ci-haut mentionnées du sexe se retrouvent chez les mammifères, sauf pour le nom commun des mâles et des femelles.

3. Revoir les volets sexualité et identité du programme CCQ

Peu importe les raisons qui ont mené à l’élaboration de la définition fautive du sexe dans le programme CCQ, rien ne peut justifier que nos programmes d’enseignement se dissocient de la réalité ou la transforment. Ceci est d’autant plus important que le déni de réalité pour un concept aussi fondamental que le sexe peut pousser des enfants vulnérables vers des questionnements inutiles et potentiellement délétères concernant leur identité.

Je vous demande donc de revoir immédiatement la définition du mot « sexe » dans le programme CCQ, et de vous assurer que l’identité sexuelle y soit expliquée de façon réaliste, positive et constructive en se fondant sur les données existantes. Ceci doit être fait non seulement dans le programme CCQ, mais aussi dans le matériel pédagogique (manuels et autres documents) lié au programme, incluant le matériel fourni par les partenaires d’enseignement concernés par ce sujet (regroupement, associations, etc.).

Quant au caractère « rigoureux » de votre processus de vérification, permettez-moi de douter de son efficacité, car dans le cas du « sexe » vous avez permis que des éléments transformateurs de notre rapport avec le monde réel s’incrustent dans le programme. La population est en droit d’exiger qu’un organisme dont la responsabilité est de veiller sur la qualité de l’éducation de nos enfants fasse un meilleur travail.

Pour le moment, le lien de confiance avec le ministère sur ce sujet est brisé. J’espère qu'il saura rectifier la situation.

Je demeure disponible pour répondre à vos questions.

Veuillez agréer, monsieur, l’expression de mes sentiments les meilleurs.

François Chapleau
Professeur émérite
Département de biologie
Université d’Ottawa
Ottawa, Ontario.
+
(Résident de Cantley, Qc)

Cc: Bernard Drainville, ministre de l’Éducation
Comité de sages sur l’identité de genre

Références

[1]Réponse du ministère de l’Éducation (30 juillet) https://dropbox.com/scl/fi/ecpgnqr3k4vi78dedj6qn/Lettre-M.-Chapleau.pdf?rlkey=puypbc8swgez5qrck5lf9jckd&dl=0

[2] Lettre du 23 mai : https://dropbox.com/scl/fi/vztermda35j9nx781piyu/Lettre-au-min.-Drainville.pdf?rlkey=ymo3sfnnc71gpx8l74r477nv1&dl=0

[3] La définition précédente du mot sexe dans le Passeport Citoyen était : catégorie sociale déterminée à la naissance à partir de certains critères comme l’observation des organes sexuels externes.

[4] https://education.gouv.qc.ca/fileadmin/site_web/documents/education/jeunes/pfeq/CCQ-Programme-Primaire.pdf (p. 59)

[5] La version précédente de la définition du sexe du programme CCQ indiquait qu’il s’agissait d’une catégorie « sociale ». Enlever le qualificatif « sociale » de la définition n’exclut pas que la catégorie soit interprétée comme étant « sociale », alors que cela est faux.

[6] Il s’agit de l’anisogamie https://larousse.fr/dictionnaires/francais/anisogamie/3611

[7] L’utilisation de l’expression « caractères physiologiques » suggère implicitement que l’identification des mâles et femelles serait liée à des traits qui montrent une certaine variabilité. Ceci impliquerait que la définition des sexes serait arbitraire (c-à-d, une construction sociale), alors que c’est faux.

[8] Voir la vidéo « Le sexe est réel et binaire : 2. Les personnes intersexes n'invalident pas la binarité sexuelle » https://youtu.be/nI9lvjxPFQU Transcription (avec réf.) sur http://lesexeestbinaire.com

[9] Ce sujet est traité dans les 2 vidéos suivantes de la série « Le sexe est réel et binaire » : Le sexe n'est pas un continuum https://youtu.be/giCZ2zWmnz8 ; Le sexe n'est pas une construction sociale https://youtu.be/-MM0krDt6MI Transcription (avec réf.) sur http://lesexeestbinaire.com

[10] Girard, M.-C. et F. Chapleau. Analyse des manuels didactiques de l’élève Culture et citoyenneté québécoise sous les angles de la rigueur scientifique et du droit des femmes à l’égalité. Étude déposée au Comité de sages sur l’identité de genre; au ministère de l’Éducation du Québec; au Secrétariat à la condition féminine et Conseil du statut de la femme. (Octobre 2024)

[11] Girard, M.-C. et F. Chapleau. Analyse des ressources et outils liés aux stéréotypes sexuels et à l’identité de genre de la Boîte à outils SansStéréotypes. Étude déposée au Comité de sages sur l’identité de genre, au Secrétariat à la condition féminine, au Conseil du statut de la femme et au ministère de l’Éducation du Québec. (Juin 2024)

[12] Sur ce sujet, voir la vidéo : Le sexe est réel et binaire : 1. Importance, définition et controverses Lien : https://youtu.be/k7z5RQa4ucI Transcription (avec réf.) sur http://lesexeestbinaire.com

[13] Chez la plupart des animaux, un individu sera mâle ou femelle (gonochronisme). Il y existe d’autres systèmes sexuels (trad. libre de « sexual systems ») beaucoup plus rares et qui ne se retrouvent pas chez les mammifères. Ainsi, chez les poissons, on retrouve des espèces qui sont des hermaphrodites séquentiels, c’est-à-dire qu’ils changent de sexe durant leur vie (p. ex. poissons clowns) ou des hermaphrodites simultanés qui portent les deux sexes et qui sont même capables d’autofécondation (p. ex., killi des mangroves). Mais, peu importe le système d’organisation du sexe; il sera toujours binaire.

[14] Il n’est certainement pas assigné à la naissance.

[15] Biason-Lauber A. WNT4, RSPO1, and FOXL2 in sex development. Semin Reprod Med. 2012 Oct; 30(5):387-95.Le 13 octobre, 2024

M. Martin Cléroux, directeur
Direction des ressources didactiques et des bibliothèques scolaires
Ministère de l’Éducation
1035, rue de la Chevrotière, 13e étage
Québec (Québec)
G1R 5A5


Table des matières du manuel approuvé de 5e année de la collection Passeport Citoyen de la maison ERPI pour le programme Culture et citoyenneté québécoise (CCQ). Le manuel reprend de vastes pans du programme ECR sur le dialogue, la diversité, le vivre-ensemble, la transition écologique (tout cela très politiquement correct).

Voir aussi

L'idéologie LGBTQ/trans dans le nouveau cours de culture et citoyenneté québécoise

Le rôle des femmes dans les religions selon le livre ECR d’ERPI pour la 2e secondaire

Canada — cinq femmes anthropologues bannies d'un colloque pour « transphobie »

Pour le gouvernement québécois, le sexe est une catégorie sociale, la biologie abolie (2023, extraits du programme ci-dessous) :

France -- Le ministère n'approuve pas les manuels. « Seul le régime de Vichy s’est permis cela. » (contrairement au Québec...)

Table ronde sur le matériel pédagogique ECR

Conférence du « politburo » du Monopole de l'Éducation du Québec (rencontre avec le personnel du Bureau d'approbation du matériel didactique, BAMD)

ECR — Dix ans plus tard, le ministère considère corriger les manuels qu'il a pourtant approuvés

 

 

 

France — Tous contre l’enseignement catholique : cible à abattre


Mise à pied d’un chef d’établissement catholique à Pau pour « atteintes à la laïcité » [!?], attaques par voie de presse contre l’établissement parisien Stanislas, caricature des écoles hors contrat : ces tirs croisés contre l’enseignement libre menacent-ils son identité ?

Le Grand Fossé n’est pas seulement le 25ème album des aventures d’Astérix et Obélix, il est aussi l’abîme d’incompréhension qui sépare l’enseignement catholique d’avec la vision caricaturale que s’en font nombre d’acteurs du paysage politique et médiatique français. Sans aucun doute, le grand effondrement du catholicisme hexagonal de ces soixante dernières années, savamment analysé par le sociologue Guillaume Cuchet, n’est pas pour rien dans cette difficulté grandissante à se comprendre. À force de manquer de clarté évangélique, le rétablissement d’une proclamation authentique de la foi au sein des écoles privées fait grincer des dents, en interne, et pousser des cris d’orfraie, en externe.

Raccourcis idéologiques et vérité brutalisée

Il n’empêche, alors même que les progressistes chantent les bienfaits de l’ouverture, le bonheur de l’acceptation des différences, ce sont les mêmes bien-pensants qui s’érigent, sans gêne aucune, en censeurs à tout crin. Les apôtres du vivre-ensemble n’ont pas le dialogue pour tous chevillé à l’âme. Quand le dialogue et la confrontation d’idées favorisent le sens de la nuance, le pointage réflexe du doigt témoigne d’un déficit intellectuel, sinon d’une peur panique. On jette l’anathème ou l’on voue aux gémonies pour mieux s’affranchir de débattre. Lorsque l’outrance a valeur de carburant et que l’exagération tient lieu de boussole, l’excès se pratiquant au mépris du sens des mots, c’est toujours la vérité qui se trouve brutalisée.

S’il était nécessaire, une simple promenade sur les réseaux ou une revue de presse non exhaustive permettrait de s’en convaincre. À propos de la question scolaire, voici un petit florilège. L’universitaire Mathilde Larrère – par ailleurs membre du parlement de la Nupes et collaboratrice au site web Arrêt sur images – décrit sur X l’actuel gouvernement comme une « sortie de messe de Saint-Nicolas-du-Chardonnet ». L’Humanité titre en Une : « École privée : Sous contrat mais hors de contrôle ». Sur France 3, à l’occasion d’un journal télévisé régional est évoquée une école hors-contrat catholique dans laquelle le journaliste affirme que « les enfants sont élevés à la dure », sans autre forme de procès. L’émission du service public Complément d’enquête diffusait jeudi dernier sur France 2 un reportage à charge – dans le sillage de celui réalisé sur le Puy du Fou – “sobrement” intitulé : « Stanislas : les dérives d’une école d’excellence ». Autoritarisme, sexisme, homophobie : tout y est passé…

La réussite des méthodes traditionnelles d’enseignement

« Les plus petits esprits ont les plus gros préjugés » estimait Victor Hugo. Lorsque l’on assiste, sinon consternés, le plus souvent impuissants, à la détérioration des conditions de transmission du savoir dans l’enseignement public – sans même parler du contenu –, on s’attendrait à davantage d’humilité et de retenue chez les détracteurs de l’enseignement privé. Mais derrière ces critiques, il est difficile ne pas y voir de la jalousie [le ressentiment]. « Leur comportement nous est un reproche vivant, leur seule présence nous pèse. » lit-on dans le livre de la Sagesse (Sg 2, 14). Comme le soulignait la journaliste du Figaro, Eugénie Bastié, un Complément d’enquête sur les dérives de Sciences-Po aurait été, sans aucun doute, bien plus pertinent.

La réussite en effet des méthodes traditionnelles d’enseignement où se mêlent ordre, discipline, vouvoiement, estrades (supposées dans l’école catholique, et qui prévalent spécialement dans l’écosystème “hors contrat”) est à mettre en balance avec l’adversité ordinaire à laquelle est confrontée une grande partie des enseignants du public. Ce contraste interroge nécessairement et la ligne éducative et le projet pédagogique de ces deux univers scolaires. Sardou pourrait-il encore chanter : « J’ai fait les deux écoles et ça n’a rien changé. » ?

Jules l’imposteur (Dominique Martin Morin), petit ouvrage rédigé par François Brigneau dans lequel, avec une plume vive et documentée, le cofondateur du quotidien Présent épingle l’anticléricalisme de Jules Ferry. En parcourant l’histoire de la Troisième République, il en rappelle l’ambition à peine cachée : celle d’extorquer de l’âme des enfants les vérités de l’Église catholique. Des “hussards noirs” de Ferry aux propos de Vincent Peillon vantant l’école républicaine comme l’instrument privilégié d’émancipation « de tous les déterminismes », il n’y a qu’une suite logique. Déjà en 1866, le fondateur de la ligue de l’enseignement, Jean Macé, déclarait : « Nous avons à faire, non de la pédagogie, mais de la propagande républicaine ».

Catholique donc signe de contradiction

Des catholiques, de plus en plus nombreux, constatent avec effroi que l’État ne cesse d’évider sa législation des dernières normes morales d’origine chrétienne. Année après année, le ministère de l’Éducation Nationale donne le sentiment d’être davantage préoccupé par le transformisme social de ses élèves que par leur instruction.

Sur l’autre flanc, celui interne à la vie des écoles catholiques, la politique du plus petit dénominateur commun prévaut depuis longtemps. Aux Assises de l’enseignement catholique de l’an 2000, son secrétaire général dénonça la nostalgie d’une « école citadelle » et se prononça pour une « école carrefour ». Cette posture débouchera sur deux désastres : l’analphabétisme religieux généralisé et la disparition d’une culture chrétienne élémentaire.  

Dans ce contexte, certains chefs d’établissements catholiques sous-contrat et l’univers catholique hors contrat dans son ensemble souhaitent absolument sortir de la tiédeur d’un catéchisme affadi. Comment peut-on se satisfaire d’un humanitarisme bon teint duquel le Christ n’apparaît plus que comme un instrument de décor parmi d’autres ? Désormais, même le secrétaire général de l’enseignement catholique, Philippe Delorme, plaide pour l’instruction obligatoire de cours de culture chrétienne dans les établissements privés catholique.

Depuis Antigone et le Christ lui-même, c’est rendre hommage à la raison humaine que de défendre ses convictions. C’est participer à l’élévation du débat que d’apporter la contradiction. Vivre en chrétien, c’est d’ailleurs accepter d’en devenir un signe. Et vivre en Français, c’est se réjouir d’en voir se lever. 


Source : Valeurs actuelles